Diégèse




samedi 14 mai 2016



2016
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#Péguy-Pasolini - les textes de Diégèse 2016 -










Nous en avons eu un exemple éminent dans l'affaire Dreyfus continuée en affaire dreyfusisme. On peut dire que les politiciens introduisent et dans l'action et dans la connaissance (où déjà il y en a tant, où il y en a tant de naturelles), des difficultés artificielles, des difficultés supplémentaires, des difficultés surérogatoires, des difficultés plus qu'il n'y en a. Et il y en a déjà tant. Ils veulent toujours, quelquefois par politique, mais généralement par incompréhension naturelle, par insuffisance, par incapacité d'aller profondément, que les serviteurs des mystiques deviennent les agents des politiques. Ils introduisent partout, ils découpent, des déchirures temporelles gratuites, des déchirures politiques artificielles. Comme si ce n'était pas assez déjà des grands déchirements mystiques. Ils créent ainsi des enchevêtrements. Nous en avons eu un exemple éminent dans cette immortelle affaire Dreyfus continuée en affaire Dreyfusisme. S'il y en eut une qui sauta par-dessus son point de discernement, ce fut celle-là. Elle offre, avec une perfection peut-être unique, comme une réussite peut-être unique, comme un exemple unique, presque comme un modèle un raccourci unique généralement de ce que c'est que la dégradation, l'abaissement d'une action humaine, mais non pas seulement cela : particulièrement, proprement un raccourci unique, (comme) une culmination de ce que c'est que la dégradation d'une action mystique en action politique passant (aveuglément ?) par-dessus son point de rupture, par-dessus son point de discernement, par dessus son point de rebroussement, par-dessus son point de continuité discontinue.
Jeanne d'Arc, contemporaine, est une femme qui fait autre chose que ce que l'on permet aux femmes. Elle est kurde. Elle est palestinienne. Elle est syrienne. Elle est irakienne. Elle est française aussi. Elle est dans l'Histoire et dans notre histoire. Rien n'oblige à ce qu'elle soit vierge. Il y a d'ailleurs beaucoup de femmes dans l'histoire qui ont fait pour la première fois ce qu'on ne leur permettait pas et on ne les a pas condamnées à la virginité éternelle. On a fait de Jeanne d'Arc une Sainte, et pour que ce soit plus plausible, on l'a laissée pucelle. C'est quand même curieux, cette crainte terrible de la sexualité des femmes qui fait que la sainteté ne s'entendrait qu'avec la virginité. Car, on connaît de nombreux saints à qui l'histoire n'a pas imposé cela. Avant de devenir Saint, et même Père de l'Église, Augustin connut ce que l'on nomme la débauche, et il connut tant de débauches qu'il inventa le péché originel. Il n'en demeure pas moins qu'il n'était pas vierge et que l'Église en a fait un Saint. Heureusement, il y a Marie-Madeleine, qui est Sainte parmi les Saintes, et personne n'a jamais prétendu qu'elle était demeurée vierge. Marie de Magdala, somptueuse pécheresse, est le premier témoin de la résurrection du Christ, et personne n'a demandé qu'on lui reconstruise auparavant sa virginité. En conséquence, nous nous passerons bien de la virginité de Jeanne, estimant que cela ne nous regarde pas. En fait, la virginité, c'est comme la circoncision. Il y a ceux qui considèrent l'une et l'autre sur le plan de la chair, et sur le plan de la chair, ce n'est pas grand chose, un hymen et un prépuce, c'est à peine quelques grammes et c'est vite oublié. Il y a ceux qui considèrent la virginité sur le plan de l'amour et cette virginité-là ne pèse pas quelques grammes de chair. L'armure d'amour de Jeanne n'était pas une ceinture de chasteté.
Charles Péguy - Notre Jeunesse  -
Diégèse 2016 - Péguy-Pasolini #10










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C'est le matin et je ne sais pas quoi écrire mais ce n'est pas grave car pour un écrivain, le problème n'est jamais de savoir quoi écrire, ni d'avoir quelque chose à écrire, encore moins à dire et encore moins à raconter.