Diégèse




dimanche 15 mai 2016



2016
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#Péguy-Pasolini - les textes de Diégèse 2016 -










Pour en revenir au début de notre propos, il me semble qu'il y a de bonnes raisons pour prétendre que la culture d'une nation (en l'espèce l'Italie) est aujourd'hui exprimée avant tout par le langage du comportement, ou langage physique, plus une certaine quantité - complètement conventionnelle et extrêmement pauvre - de langage verbal. C'est à ce niveau de communication linguistique que se manifestent :
1. La mutation anthropologique des Italiens.
2. Leur complète réduction à un modèle unique.
Ainsi, décider de se laisser pousser les cheveux jusqu'aux épaules, ou se les couper et se laisser pousser des moustaches (façon 1900) ; décider de se mettre un bandeau sur la tête ou de s'enfoncer un béret sur les yeux ; décider si l'on rêve d'une Ferrari ou d'une Porsche ; suivre attentivement les programmes télévisés ; connaître les titres de quelques best-sellers ; mettre des pantalons et des chemises à la toute dernière mode ; entretenir des rapports obsessionnels avec des filles que l'on garde auprès de soi comme ornement tout en prétendant qu'elles sont « libres », etc., : ce sont tous des actes culturels. Aujourd'hui, tous les jeunes Italiens font ces mêmes actes, ont ce même langage physique, sont interchangeables, ce qui serait une chose vieille comme le monde si elle se limitait à une classe sociale, à une catégorie. Mais le fait est que ces actes culturels et ce langage somatique sont de toutes les classes. Sur une place remplie de jeunes, personne ne peut plus distinguer - ce qui était encore possible en 1968 - à son extérieur un ouvrier d'un étudiant, un fasciste d'un antifasciste.

La Jeanne d'Arc contemporaine serait une femme qui se lèverait pour combattre le joug insupportable qui pèse sur la nation. Il est probable que dans ce cas elle serait anticapitaliste. Elle recevrait l'injonction de combattre les forces économiques et politiques iniques qui affament les peuples, qui vident les campagnes, qui empoisonnent les airs et les eaux, ces jougs qui valent bien le joug anglais du Moyen-Âge. Ainsi, Jeanne d'Arc serait anticapitaliste et écologiste. Et ce n'est pas tout. Elle se lèverait aussi pour libérer les femmes des forces patriarcales qui les oppressent et qui n'ont jamais cessé vraiment de les oppresser. Elle serait donc aussi féministe.
Peu à peu, on cerne donc mieux les contours d'un mythe johannique revisité, et, comme le souhaitait Monsieur Macron, « réapproprié » : celui d'une héroïne transgenre anticapitaliste, écologiste et féministe. Il n'est pas certain que c'était vraiment ce qu'il avait en tête en allant participer aux fêtes johanniques avec le maire d'Orléans. Mais il est vrai que faire des choses convenues ne conduit qu'à des déconvenues.
C'est exactement pour cela que ni Péguy ni Pasolini ne sont réactionnaires ; Pasolini, parce qu'il ne mythifie pas l'Italie ancestrale et patriarcale, mais qu'il dénonce ce qui, se grimant sous des airs de liberté, se révèle en réalité une nouvelle aliénation ; Péguy, parce qu'il aurait dénoncé l'usage politique du mythe johannique en opposition à un usage mystique, qui serait le véritable et bon usage véritablement politique de ce même mythe. L'un et l'autre ne plaident pas pour des sociétés figées, tournées vers le passé. Péguy n'est pas Maurras et Pasolini n'est pas fasciste, ni communiste, ni chrétien. Mais, et Péguy et Pasolini, en tant qu'artistes, portent un regard mystique sur leur temps, qui est en fait le seul regard humaniste possible.
Le véritable fascisme et donc le véritable antifascisme
Pier Paolo Pasolini - Écrits corsaires

Diégèse 2016 - Péguy-Pasolini #10










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C'est ainsi que nous formons ce que nous nommerons notre goût, cette agglomérat d'affects et de circonstances.