Pour moi si
ayant achevé une œuvre infiniment plus grave je viens à
l'âge des Confessions, qui est, comme on sait, cinquante ans révolus, à
neuf heures du matin, c'est ce que je me proposerai certainement d'y
représenter. J'essaierai, reprenant, achevant mon ancienne
décomposition du dreyfusisme en France de donner non pas une idée, mais
j'essaierai de donner une représentation de ce que fut dans la réalité
cette immortelle affaire Dreyfus. Elle fut, comme toute affaire qui se
respecte, une affaire essentiellement mystique. Elle vivait de sa
mystique. Elle
est morte de sa politique. C'est la loi, c'est la règle. C'est le
niveau des vies. Tout parti vit de sa mystique et meurt de sa
politique. C'est ce que j'essaierai de représenter. J'avoue, je
commence à croire que ce ne sera pas inutile. Je soupçonne qu'il y a
sur cette affaire Dreyfus de nombreux malentendus. J'avoue que je ne me
reconnais pas du tout dans le portrait que Halévy a tracé ici même du
dreyfusiste. Je ne me sens nullement ce poil de chien battu. Je consens
d'avoir été vainqueur, je consens (ce qui est mon jugement propre)
d'avoir été vaincu (ça dépend du point de vue auquel on se place), je
ne consens point d'avoir été battu. Je consens d'avoir été ruiné, (dans
le temporel, et fort exposé dans l'intemporel), je consens d'avoir été
trompé, je consens d'avoir été berné. Je ne consens point d'avoir été
mouillé. Je ne me sens point ce poil de chien mouillé. Je ne me
reconnais point dans ce portrait.
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De
plus fins politologues que je ne le suis pourront m'expliquer que l'on
peut être un parti xénophobe, souverainiste, aux valeurs ultra
conservatrices sans pour autant être un parti d'extrême-droite,
c'est-à-dire, catalogué à l'extrême-droite. Cela participe au
brouillage des cartes et cela, aussi, explique la désaffection des
masses pour les partis. Avant, les partis, on savait ce qu'il y avait
dedans, c'était écrit sur l'emballage. Cela servait même aux gens qui
pensaient à peu près la même chose à se rassembler pour faire valoir
leurs idées. Presque tous les partis... En ce qui concerne le parti
socialiste, même Péguy déplorait que ce ne fût pas, déjà, le cas. Le
parti socialiste sert à tout autre chose qu'à se rassembler autour
d'idées communes : par exemple, à élire des gens - dont on ne sait donc
pas toujours précisément
ce qu'ils pensent - et c'est comme cela depuis
longtemps, sinon depuis sa création. Sur ce dernier point, les
fédérations et confédérations syndicales sont plus claires. Elles ont
des plateformes de revendications, elles les portent, elles les
affichent et elles manifestent en criant des slogans. Un parti qui
gouverne, c'est beaucoup plus flou, ce que ça pense. Et je ne prendrai
pas dans l'actualité française récente
d'exemples pour illustrer mon propos. Ce serait trop facile de
brocarder et les uns et les autres, qui s'opposent sur quelque chose
qui n'existe pas.
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