Diégèse




lundi 28 novembre 2016



2016
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#Péguy-Pasolini - les textes de Diégèse 2016 -










Et mieux, à ce propos, je voudrais déclarer ici publiquement que je ne suis pas, que je n'ai jamais été et que je ne serai jamais un « compagnon de route » d'un homme aussi ignorant et aussi fier de son ignorance. En effet, son interchangeabilité, conformiste et bien-pensante, ne peut qu'être le signe d'une « continuité » la « continuité » de la petite-bourgeoisie italienne et de sa conscience malheureuse (refus de la culture, souci anxieux de la normalité, indifférentisme physiologique, chasse aux sorcières). Ce n'est pas pour rien que, dans le texte en question, Napolitano est défini comme le ferait un homme de pouvoir devant qui on « accuserait », comme s'il s'agissait de Bottai ou d'un cardinal.
Le conformisme est toujours déplorable, mais celui qui se trouve du côté de la raison (c'est-à-dire, pour moi, le « conformisme de gauche ») est particulièrement douloureux. Bien évidemment, mon article « contre l'avortement » est incomplet et passionnel, je le sais. L'une de mes amies, Laura Betti, m'a fait remarquer qu'il y manque physiologiquement la femme ! Elle a raison. Alberto Moravia a dit que le fonds de mes arguments est paulinien : c'est-à-dire que chez moi, comme chez saint Paul, on trouve la prétention inconsciente à la chasteté de la part de la femme. Il a raison, lui aussi. J'ai davantage mis l'accent sur l'enfant que sur sa mère dans la mesure où, dans ce cas, il s'agit d'une mère hostile. Je ne pouvais pas ne pas l'écarter et privilégier son fruit. Ce que fait le cardinal Florit quand, parlant à juste titre de massacre des innocents (les fœtus), il ignore le massacre des innocentes (les femmes en tant que citoyens inférieurs). Mais de même que l'on dira « fortuite » mon éventuelle concordance idéologique avec Nello Ponte, on dira tout aussi « fortuite » la coïncidence de mon opinion sur l'avortement avec celle du cardinal Florit. En effet, j'exclus que l'on ait le droit de parler de massacre des innocents si l'on n'a pas parlé tout aussi publiquement et explicitement des massacres, par exemple, des juifs, et plus encore, si l'on n'a pas parlé tout aussi publiquement et explicitement des massacres culturels et humains du nouveau pouvoir (que, par ailleurs, un cardinal ne peut pas ne pas confirmer, sans solution de continuité avec le précédent pouvoir).
Enfin, quant à mon opinion, je n'attends rien d'autre, sinon que l'on me convainque qu'elle est fausse. Je ne pourrais qu'être heureux de me trouver sur ce plan aussi aux côtés d'hommes avec qui, pour l'essentiel (en dépit de la force centrifuge, hérétique et déviante qui est l'une des caractéristiques de mon état d'intellectuel), je suis d'accord et, si je peux employer ce mot, je lutte. J'attends que l'on me convainque rationnellement, et non à travers des inférences reposant sur ma personne ou sur la « correction » de mon idéologie.


La pétition qui dit non au « Hollande-bashing » a recueilli, en ce matin du 28 novembre 2016, 7396 signataires. Terminons de l'examiner. Une fois admis qu'il s'agit du pré-achat du comité de soutien « culturel » du Président une fois celui-ci redevenu candidat à la Présidence, on peut s'interroger, de fait, sur l'utilité de la manœuvre, c'est-à-dire l'utilité électorale : combien de voix est-ce que cela peut rapporter ? C'est évidemment difficile à mesurer, sauf à effectuer un sondage, ce qui serait un déploiement de moyens disproportionné avec l'enjeu... Quoique... Il faudra bien étudier les trafics de notoriété dans le champ politique, qui sont le transfert vers les campagnes électorales de techniques éprouvées dans les campagnes publicitaires. Cela, certes, n'est pas nouveau. De la même façon que des « stars » ont accepté de longue date de vendre du potage, les mêmes ont accepté de s'afficher dans des meetings électoraux. Ce qui est nouveau ici, c'est la forme pétitionnaire, d'une part, le transfert, ou plutôt la transfusion de notoriété, d'autre-part. Sur la forme pétitionnaire qui exigerait que les médias « prédateurs » cessent de dire du mal de François Hollande, on maintiendra qu'elle paraît peu adaptée à l'objectif recherché, ou affiché. D'ailleurs, le nombre de signatures n'a pas vraiment décollé. Dans le même temps, sur le même site, 55 000 personnes ont signé pour que les hôpitaux de Paris distribuent leurs repas non consommés aux réfugiés et plus de 60 000 personnes se sont déclaré en faveur de la naturalisation des tirailleurs sénégalais. C'est que le nombre de pétitionnaires dépend, certes, de la force émotionnelle de la pétition, mais aussi de la prédictibilité de son objectif. Si la cause semble d'emblée perdue, peu de chance qu'elle suscite une vague de soutiens, sauf si l'émotion submerge le tout. François Hollande, même harcelé, n'est pourtant pas un bébé-phoque. Reste l'échange de notoriété. Le soutien affiché de personnalités célèbres dans leur champ d'activité a pour objectif, le plus souvent, de démontrer et d'amplifier la dynamique d'une candidature politique dans la société civile. L'électeur, par un processus d'identification surexploité par la publicité, voudra, lui aussi, recevoir l'onction de notoriété proposée, qui s'effectuera par le rite électoral. Ceci est la théorie. Dans le cas qui nous occupe, ce qui est paradoxal, c'est de faire appel à des personnalités intégrées dans le système de notoriété pour critiquer ce même système de notoriété pour enrayer une dynamique négative. Il s'agit donc bien d'une forme de transfusion de notoriété vers quelqu'un qui en manque cruellement, dont on gagera qu'elle a peu de chance de réussir. Il se pourrait même que la transfusion fonctionne à l'envers et que le déficit dans l'opinion du Président se propage aux signataires imprudents, qui apparaîtront dès lors comme une petite bande parisienne et parisianiste, ce que l'électorat qui, par ailleurs, vient d'adouber un bourgeois traditionnel de province, abhorre. On ne retiendra donc de cette initiative à contre-temps politique qu'elle demeure, dans sa spontanéité naïve, sympathique, ce qui est une façon agréable de dire qu'elle est ridicule.
Pier Paolo Pasolini - Écrits corsaires - Thalassa
Péguy-Pasolini #22 - Texte continu










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