Diégèse




vendredi 12 avril 2019



2019
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Et qu'est-ce qu'il y aurait après ? 102



Mathieu Diégèse














J'étais déjà bien vieux quand un matin, peu après les onze heures, alors que je regardais le jardin éreinté par l'hiver, on sonna. Ma bonne Bérengère me demanda, comme elle en avait coutume, l'autorisation d'aller s'enquérir de cette visite inattendue. Elle avait auparavant servi chez un bourgeois ruiné, harcelé par des créanciers, qui lui avait bien interdit d'ouvrir sans lui en demander auparavant l'autorisation. Mais, je n'avais pas de dettes, ou je n'en avais plus et j'autorisai Bérengère à descendre voir qui pouvait bien venir, pensant à quelque colporteur comme on en voyait encore, couvert de bimbeloteries toutes plus inutiles les unes que les autres.

Bérengère revint, m'annonçant qu'une certaine Berthe Bovary se faisait annoncer et demandait audience. De prime abord, le nom ne me dit rien, jusqu'à ce que surgît de ma mémoire une scène de l'enfance, et plus précisément un épisode du collège alors que j'avais à peine treize ans. « Charbovari ! » Je me rappelais bien désormais cette scène comique comme si le vocable « Charbovari » avait ouvert, tel une clé, une boîte fermée emplie de l'enfance. « Nous étions à l'étude, quand le Proviseur entra, suivi d'un nouveau habillé en bourgeois et d'un garçon de classe qui portait un grand pupitre... » C'était la première apparition de Charles Bovary dans ma vie. Berthe, devenue femme, devait être sa fille.

Elle était sa fille. Je la regardai, tentant de dissimuler sous l'âge ma curiosité. Avait-elle les cheveux noirs de sa mère et ces gestes indolents qui avaient fait jaser ? Ressemblait-elle un peu nigaude à son pauvre père ? Berthe Bovary était une grande femme, solide, les mains usées déjà par le travail à la filature où sa tante l'envoyait enfant. Elle n'avait rien de sa mère, du moins en apparence, et pas davantage de son père. Il eût sans doute fallu remonter plus loin dans la généalogie familiale pour comprendre quels traits la nature lui avait fait emprunter. Mais que me voulait-donc, un matin à onze heures, la fille de Charles et d'Emma Bovary, alors que j'étais sans doute un des seuls encore à Tostes à se rappeler le nom de ce médecin et de sa femme dont les frasques avaient un temps tenu le premier rang des conversations sur la place et chez le pharmacien qui, curieusement, n'avait jamais voulu rien en dire ?









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4e de couverture






On le sait, Mathieu Diégèse est un écrivain oulipien. Mais il n'est pas que cela. C'est aussi un inventeur inlassable d'histoires fantastiques. Son dernier roman en apporte une nouvelle preuve à ses lecteurs.
Qu'est-ce qui se passe après ? Non pas après la mort ! Mais, après le texte, après le roman. Nous avons tous en tête la phrase magique des contes de fée de notre enfance : « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants. » Mais, même pendant l'enfance, cette phrase, sempiternelle, paraissait mensongère. On nous cachait quelque chose. Ce bonheur parfait s'étalant indéfiniment dans une absence de récit paraissait, à juste titre, suspect. Alors, Mathieu Diégèse s'emploie à nous dévoiler la suite, ce qui se passe après la fin.
Ce premier tome d'une série qui s'annonce longue et fertile est consacré aux personnages qui demeurent vivants à la fin de Madame Bovary. Le lecteur avait laissé Rodolphe devant une bouteille de bière vide après sa rencontre avec Charles. Il le suivra désormais jusqu'à sa mort. Comme il suivra la fille de Charles et d'Emma, la petite Berthe, envoyée par sa tante, après la mort de sa grand-mère, dans une filature pour gagner sa vie. L'auteur fait de ce personnage féminin, ouvrière déclassée, une femme fascinante qui reconstitue bribes par bribes l'aventure néfaste de sa pauvre mère. Rencontrera-t-elle un jour Rodolphe, devenu vieux ? Il faudra pour le savoir que vous lisiez le livre.










12 avril







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