Diégèse | |||||||||
mercredi 3 juillet 2019 | 2019 | ||||||||
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Une Influence décisive | 184 | ||||||||
Daniel Diégèse | |||||||||
Face
à l'urgence, la
Présidente demande à sa directrice de Cabinet
d'appeler le dirigeant de l'agence-conseil qui a accompagné le
processus de nomination des ministres par tirage au sort. Il commence à
y avoir des incendies médiatiques partout et elle veut avoir son
diagnostic. Le dirigeant en question est évidemment le
Président-fondateur, personnalité bien connue des médias et des
lobbyistes pour avoir ses entrées à l'Élysée depuis la création de la
Cinquième République ou presque. Il a d'ailleurs connu la Présidente au
tout début de sa carrière politique, quand elle était chargée de
mission au Cabinet du ministre de l'environnement, repérée très tôt par
un ponte d'une loge en vue, qui connaissait son père, qui y officiait. On prévient la Présidente dès qu'il arrive. Elle sait qu'il déteste qu'elle le fasse attendre, considérant qu'un vieux monsieur comme lui ne doit pas encore subir l'épreuve de l'antichambre. Il y avait pourtant attendu, dans ce palais de l'Élysée... des heures même, mais il était jeune encore et le Président qu'il attendait était François Mitterrand. À chaque élection, il attendait un peu moins. C'est avec Nicolas Sarkozy qu'il a attendu le moins. Celui-ci était tellement heureux de recevoir quelqu'un qui avait été visiteur du soir chez Mitterrand, qu'il sortait en trombe de son bureau dès qu'il était annoncé. Il lui était aussi reconnaissant de l'avoir choisi contre Ségolène Royal, alors que jusque là, il était plutôt considéré comme un homme de gauche. Mais, Ségolène Royal l'avait fait attendre un jour, pendant une heure, ce qui lui avait en tout point paru inacceptable. Hollande ne l'avait jamais fait attendre plus de cinq minutes. Il faut dire qu'il lui avait sauvé la mise plusieurs fois quand il était encore Premier Secrétaire du Parti socialiste. Macron lui avait donné des assurances sur son influence préservée dès les premiers jours de son mandat en lui accordant un rendez-vous. Mais, en fait, le signal positif avait été donné dès le soir de l'élection présidentielle quand le jeune Président avait répondu à un message électronique au vieux conseiller des princes. Il n'était d'ailleurs pas pour rien dans l'invention du « nouveau monde », lui qui était l'expert reconnu de l'ancien. Car, il était en fait un expert en façadisme inversé. On sait que le façadisme est cette manière de construire des immeubles neufs tout en gardant la façade qui donne sur rue, ce, à des fins patrimoniales. Lui, faisait, s'agissant de la politique, exactement le contraire. Il proposait au pouvoir de changer la façade tout en préservant entièrement ou presque l'immeuble du pouvoir. Il était évidemment à l'origine de cette idée de ministres tirés au sort dans la population. Ce qu'il restait de médias d'opposition avait ironisé en rapprochant ce show médiatique d'un jeu connu au vingtième siècle sous le nom de « La Valise RTL », jeu diffusé sur une station de radio qui consistait à appeler au hasard des personnes qui, si elles connaissaient le montant de « La Valise » gagnaient ce même montant. Il faut dire que l'émission télévisée de tirage au sort des ministres avait été particulièrement inquiétante sinon grotesque. Le tirage au sort avait bien sûr été mimé, car, il ne s'agissait pas de tomber sur quelqu'un qui aurait refusé de devenir ministre. Un des moments le plus terrible avait été quand la caméra était venue sortir une infirmière de nuit de son service pour lui annoncer, ou faire semblant de lui annoncer, qu'elle était nommée ministre de la santé. On l'avait retrouvée dès le lendemain matin dans le bureau ministériel après un passage par un institut de relooking bien connu de la place de Paris. Il en avait été de même pour tous les autres ministres, le tirage au sort ayant été effectué par profession. Le ministre de l'éducation nationale était ainsi un professeur des écoles, encore remplaçant, de la banlieue de Bordeaux et le ministre de l'intérieur un vigile d'un supermarché de Corrèze. |
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page 184 | |||||||||
Toute la collection | 4e de couverture | ||||||||
Le nouveau
gouvernement
vient d'être nommé. La nouvelle Présidente de la République, élue, une
nouvelle fois, contre l'extrême-droite, avec un écart de voix très
faible, avait promis un gouvernement entièrement nouveau. Elle a tenu
sa promesse. Le gouvernement français est constitué de femmes et
d'hommes que personne ne connaît. « Personne », signifie bien
sûr,
personne parmi les médias, les lobbyistes, le personnel politique, la
haute administration... Pour le reste, elles et ils sont honorablement
connu.e.s de leur famille, leurs amis, leur entourage professionnel.
Comment les a-t-elle choisi.e.s ? Par tirage au sort, arguant que
si l'on
pouvait confier à un jury populaire le sort d'un justiciable, on
pouvait tout autant confier par le même procédé la conduite politique
des affaires de la France, puisque pour les questions techniques,
l'administration répondait très bien aux questions posées. Ce roman de Daniel Diégèse relate les cent jours de ce gouvernement pas comme les autres, depuis la passation de pouvoir jusqu'à la rentrée politique de l'automne. C'est un roman tout aussi désopilant qu'inquiétant. Et s'il ne fallait que cent jours pour que le pouvoir transforme un.e honnête citoyen.ne en notable autoritaire ? |
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3 juillet |
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