Diégèse




vendredi 7 juin 2019



2019
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Désuétude 158



Mathieu Diégèse














Téloche

On s'amuse à penser que les habitants de Teloché dans la Sarthe, donnant un peu d'avancement à leur accent aigu, inventèrent la téloche qui est à la télé ce que le cinoche est au ciné.

Mais, que signifie donc ce suffixe si populaire que l'on rencontre aussi dans une « valoche », une « péloche » et même dans la « bidoche » ? Ce n'est pas si fastoche d'en décider... On sait que les valoches apparurent en 1913 et préparaient alors sans doute la guerre. On sait aussi que le mioche de 1787 était certainement pré révolutionnaire.

Quant à la pétoche, que, selon les cas, on a ou on n'a pas, était autrefois une chandelle, qui, allumée, mettait à coup sûr le feu aux trousses.

Peu importe, car, c'est souvent bien moche ce que l'on voit à la téloche et c'est pourquoi, on l'imagine en tout cas, que Teloché se trouve si près de Changé et qu'il est donc fastoche de mater la téloche à Teloché et d'en changer à Changé. Bof.

Enfin, qu'on se le dise, ce petit suffixe familier demeure disponible pour qui voudrait encore l'utiliser afin de susciter, comme on dirait dans les formations en management, un fabuleux sentiment d'appartenance. Le fastidieux ordinateur aura préféré, quant à lui, se séparer de sa queue pour devenir l'ordi. Que serait alors un « ordoche » ? Ou même un « ordinoche » ? C'est bien simple : ce serait l'ordi de la famille, celui qu'il faut réserver car, le grand-frère le squatte pour jouer. Mais à quoi joue-t-il sur l'ordinoche ? On n'en saura rien. Fréroche n'est pas bavard et n'aime pas qu'on lui fasse les poches. On risquerait bien alors une taloche.









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4e de couverture






Désuétude... Le terme même semble refléter ce qu'il signifie. « Désuétude » est tombé en désuétude. Quel joli mot pourtant, que l'on tient du latin « desuetudo » qui signifie : désaccoutumance.
Dans ce recueil de courts textes qui sont aussi des poèmes, Mathieu Diégèse, avec une grande délicatesse, est allé chercher ces mots hier encore couramment utilisés et qui s'éteignent ou vont s'éteindre. Car, les mots sont comme les choses : leur désuétude peut être calculée.
On retrouvera donc, avec ou sans nostalgie, notre bonne vieille « téloche » qui n'avait pas encore d'écran plat, et ne concurrençait en rien, et surtout pas en taille le « cinoche » du bout de la rue. Mais on y trouve aussi nos vieux « futals », dont on pouvait se demander pourquoi le pluriel semblait irrégulier. On n'a pourtant jamais dit : il a de drôles de « futaux ».
Bref, ce recueil est une mine qui attendrira les plus de quarante ou cinquante ans et surprendra les plus jeunes, qui choisiront peut-être de sortir de leur « désuétude » certains de ces termes empoussiérés. Le dernier mot pourrait bien revenir à Paul Valéry, qui nous rappelle ceci :
Un mot qui perd de sa vigueur, ou de son empire, ou de sa fréquence et de sa spontanéité, un mot qui n'est plus honoré que par nous seuls, dans notre dictionnaire assez réservé par une sorte de pieuse piété, pour mémoire, et comme la cendre d'une idée qui a cessé d'être vivante, ce mot, par son même déclin, nous peut encore enseigner quelque chose : la désuétude elle-même confère à un terme mourant une sorte de suprême signification.










7 juin







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