Diégèse




mercredi 13 novembre 2019



2019
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Si donc Satan se révolte contre lui-même 317



Noëmie Diégèse














Il arrive parfois, au moment de terminer un ouvrage, que l'on découvre que l'on n'a pas vraiment commencé à traiter le sujet ou alors que d'autres, une autre, un autre, l'ont déjà traité, de manière définitive, provisoirement sans doute, mais de manière plus convaincante que l'on n'a pu et su le faire. C'est ici la misère et c'est ici la grandeur de toute pensée et de toute création. Quand bien même on ne ferait pas cette découverte, que d'autres viendront ensuite et qui, avec plus de clarté et plus de force, reprendront l'ouvrage et votre œuvre - que ne dis-je : votre travail, votre balbutiement - deviendra une référence plus ou moins importante, parfois un simple appel de note. Mais, cela ne doit décourager ni de lire, ni d'écrire, ni, surtout, de tenter de penser.

C'est donc ce qui est arrivé à l'auteure de ces lignes qui, au moment de clore cet opuscule, a découvert un petit ouvrage qu'elle avait soigneusement évité jusqu'alors. Il s'agit, publié chez Labor et Fides - ce qui est déjà tout un programme - du texte d'une conférence donnée par Paul Ricœur en 1985 à l'Université de Lausanne et intitulé par l'éditeur : « Le mal » et sous titré ainsi : « Un défi à la philosophie et à la théologie ». Contentons-nous ici de donner le commencement de la quatrième de couverture : « D'où vient le mal ? D'où vient que nous fassions le mal ? Chez Paul Ricœur, méditer le mal, c'est dire une faille. Car la liberté de l'homme est sommée à exister devant le mal. (...) »

De ce livre lu quelques mois auparavant, que reste-t-il ? Une interprétation vague... imprécise... indolente presque. C'est encore la voix de Roland Barthes qui résonne soudain : « le scandale, ce n'est pas que la mort existe, mais que l'amour et la mort existent en même temps. » La citation de l'un des derniers cours de Barthes au Collège de France est apocryphe, mais elle pourrait certainement être rétablie facilement. « En même temps ! » Les affres d'un jeune et habile politicien se réclamant du philosophe, à notre sens indûment, ont rendu célèbre en France ce « en même temps » supposé condenser la pensée de Paul Ricœur. Dont acte. Mais, ce qui semble désormais simple recèle des monceaux de complexité. « En même temps. » Ainsi, ce qui serait scandaleux, et qui l'est assurément, ce n'est pas que le mal existe, mais que le bien et le mal existent en même temps. Cet « en même temps », ne suppose pourtant pas un affrontement. Et c'est d'ailleurs la supposition de cet affrontement qui conduit à l'aporie. Si l'on commence à penser, ou pire, à croire, que le bien est en lutte contre le mal ou que le mal est en lutte contre le bien, on ne parvient à rien ou bien au désespoir et ce, pour les siècles des siècles. Il faut commencer à penser, comme une joie et non comme une affliction, que le mal et le bien n'ont rien à voir l'un avec l'autre, comme deux notions qui coexisteraient dans deux systèmes parfaitement disjoints. On ne compte plus les récits qui attestent de la présence du bien au centre des atrocités les plus terribles, ni du mal, là où le bien devrait régner en maître absolu. Pourquoi s'en offusquer ? Est-ce que l'on s'offusque de la présence de champignons vénéneux à côté de champignons comestibles dans le même sous-bois ? Certes non. Il faut juste, si les champignons vous intéressent, apprendre à distinguer les uns des autres. Mais, rien ne fera jamais qu'un champignon vénéneux devienne comestible, aucune culture, aucun soin. Et rien non plus ne fera qu'un champignon comestible devienne soudainement vénéneux.

Que l'on ne s'y trompe pas ! Ces dernières lignes en aucun cas ne pourraient signifier que certains humains sont mauvais et que d'autres sont bons et qu'il faut s'y résigner. Tout au contraire. En chacune et en chacun, bien et mal coexistent. C'est difficilement discutable et, pour les Chrétiens mêmes, l'état de sainteté n'exige pas l'extinction du mal en soi, puisque pour être sainte ou saint, on n'en est pas moins pécheresse ou pécheur. Il faut seulement apprendre à distinguer là où le mal se niche et agit. Ce n'est pas toujours si facile de reconnaître en soi ces anciens domaines que l'on nommait auparavant « sinistres ». Mais quel autre chemin sommes-nous appelés à suivre au cours de cette brève existence humaine pourtant irréparablement inscrite pour l'éternité au registre des âmes ?









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4e de couverture






Noëmie Diégèse, écrivaine originale, ose reprendre des sentiers bien tassés par des siècles et des siècles de glose et de commentaires : le mal. Tous les philosophes ou presque ont approché la bête. La bête ? Oui et non. Car, il y a le mal et l'incarnation du mal. Noëmie Diégèse part quant à elle explorer la figure contemporaine de Satan. Cela pourrait sembler une entreprise bien naïve ou strictement ethnologique. Il n'en est rien. Noëmie Diégèse explore par exemple l'iconographie des médias, et notamment des médias en ligne et trouve, sans chercher bien longtemps, des images dont l'analyse montre qu'elles maintiennent de façon subliminale l'idée d'un mal spécifiquement incarné dans une créature diabolique. Les adeptes de l'islamisme radical violent sont ainsi souvent les effigies de ce mal présenté comme un mal absolu.
Or, la thèse de Noëmie Diégèse est qu'il n'y a pas de mal absolu, et c'est ce qui fait sa propre faiblesse, puisque le mal est divisé contre lui-même, comme le rappelle Marc l'évangéliste dans le verset qui donne au livre son titre.
Et si c'était la diabolisation d'autrui qui était l'une des sources principales du mal dans nos sociétés ?










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