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Il n'y avait
rien mais le
jour il y avait la mer. Il y avait la mer et il
y avait le bleu de
l'hiver
sur la mer bleue. Je regardais la mer. Je m'échappais pour regarder
la mer. Je regardais la mer seule, très seule, avec mes souvenirs
puisque j'avais des souvenirs, puisque j'étais la seule à
avoir des souvenirs. Aujourd'hui, je
n'ai plus assez de loisir pour vouloir en gaspiller à ce genre de
subtilités. Aujourd'hui, je suis loin de la mer, entièrement
aux souvenirs et tout à la fois dans cet éloignement de
la
mémoire, ce texte. Dois-je encore remuer
l'avenir pour écrire le passé ?
Ce sont
d'autres
voyages
qui pourraient m'émouvoir. Je me rappelle une forteresse, plus
loin,
là-bas. Je
me rappelle que j'avais posé les mains sur ces pierres et que j'avais
senti mes forces m'abandonner, ou plutôt passer de mon corps dans
la pierre et se dissoudre. C'est à ce moment-là,
dans
un seul instant, à cet endroit précis que j'ai laissé
la vie d'avant à la mémoire des pierres. |