Diégèse | |||||||||
lundi 5 octobre 2009 | 2009 | ||||||||
ce travail est commencé depuis 3566 jours (2 x 1783 jours) | et son auteur est en vie depuis 18019 jours (37 x 487 jours) | ||||||||
ce qui représente 19,7902% de la vie de l'auteur | |||||||||
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D. | |||||||||
Je
suis encore à Ankara. Je
croyais mieux connaître la ville, pouvoir l'enserrer davantage dans
les souvenirs. J'espérais qu'en continuant le voyage de Gustav,
de Mathieu et de Noëmie, je pourrais m'éloigner de la fiction
et m'approcher du réel. C'était une naïveté que
j'ai abandonnée au bord d'une autoroute rhénane. Je reste
ainsi dans les limbes textuels et ce voyage devient un pèlerinage
expiatoire. Je ne savais pas que tu
étais un personnage lors de notre rencontre. Comment aurais-je pu
imaginer que tu ne te pliais pas aux règles ordinaires de la réalité
? Mais j'ai compris assez vite que tu apparaissais et que tu
disparaissais
au gré des humeurs et des souhaits d'un auteur tout puissant dont
les objectifs m'échappaient et semblaient t'échapper aussi. Nous n'étions dès lors
pas maîtres de notre fiction. Tu m'as avoué un jour que tu pensais aussi que j'étais un personnage dont tu ignorais l'auteur. Mais le fait que nous soyons tous deux des personnages qui ignorent leur auteur ne suffit plus pour accepter qu'il ne se passe plus rien, qu'il ne se passe vraiment plus rien. Je suis encore à Istanbul, qui me rappelle parfois Beyrouth, la grande ville détruite de l'autre côté de la mer et les voitures américaines dans lesquelles on pouvait se cacher, s'enfouir pour aller à Baalbeck, ou ailleurs, repartir vers la frontière et revenir enfin. Je ne savais pas que tu étais un personnage lors de notre rencontre. Comment aurais-je pu imaginer que tu ne te pliais pas aux règles ordinaires de la réalité ? Mais j'ai compris assez vite que tu apparaissais et que tu disparaissais au gré des humeurs et des souhaits d'un auteur tout puissant dont les objectifs m'échappaient et semblaient t'échapper aussi. Nous n'étions dès lors pas maîtres de notre fiction. Qu'aurais-je à expier face au texte ? De te chercher puis d'oublier, dans le même temps, de te chercher. Je te cherche et je ne pense plus à toi, à l'amour, à cette entente évanouie. Dans cette quête et dans cet oubli concomitants réside le principal secret de la fiction. Dans le texte, il y a la nuit soudaine et le souvenir voilé... Cela fait de l'écriture une mystique. Il faut naviguer entre l'absence de mémoire, l'absence de souvenir de l'écriture de la veille, de ce qu'on fait les personnages, de ce qu'ils ont dit et les nouvelles du jour, les nouvelles écrites, les nouvelles parlées. Il faut naviguer entre le souvenir de l'éclipse, le souvenir des éclipses. Il faut naviguer entre tout cela, et puis écrire, entre tout cela écrire, avec par dessus l'épaule les grands anciens, les grands anciens bienveillants qui pourraient regarder. |
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5 octobre | |||||||||
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