Diégèse




jeudi 3 juillet 2014



2014
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La Fortune des Rougon2




Le groupe de Granoux et de Roudier demandait déjà que le président fît fusiller tous ces scélérats de républicains. Le marquis, appuyé contre la cheminée, regardait d'un air méditatif une rosace déteinte du tapis. Lorsqu'il leva enfin la tête, Pierre, qui semblait suivre à la dérobée sur son visage l'effet de ses paroles, se tut subitement. M. de Carnavant se contenta de sourire en regardant Félicité d'un air fin. Ce jeu rapide échappa aux bourgeois qui se trouvaient là. Vuillet seul dit d'une voix aigre :
« J'aimerais mieux voir
votre Bonaparte à Londres qu'à Paris. Nos affaires marcheraient plus vite. » L'ancien marchand d'huile pâlit légèrement, craignant de s'être trop avancé.
« 
Je ne tiens pas à "mon" Bonaparte, dit-il avec assez de fermeté ; vous savez où je l'enverrais, si j'étais le maître. Je prétends simplement que l'expédition de Rome est une bonne chose. » Félicité avait suivi cette scène avec un étonnement curieux. Elle n'en reparla pas à son mari, ce qui prouvait qu'elle la prit pour base d'un secret travail d'intuition. Le sourire du marquis, dont le sens exact lui échappait, lui donnait beaucoup à penser. À partir de ce jour, Rougon, de loin en loin, lorsque l'occasion se présentait, glissait un mot en faveur du président de la République. Ces soirs-là, le commandant Sicardot jouait le rôle d'un compère complaisant. D'ailleurs, l'opinion cléricale dominait encore en souveraine dans le salon jaune. Ce fut surtout l'année suivante que ce groupe de réactionnaires prit dans la ville une influence décisive, grâce au mouvement rétrograde qui s'accomplissait à Paris.

La Fortune des Rougon
Émile Zola
1870
La province vit dans un temps qui n'est pas celui de Paris et cela se voit en particulier pour les mœurs, le parler et parfois même, bien que cela tende à s'estomper, pour l'habillement. Mais il y a une matière pour laquelle Paris et la province vivent de façon simultanée, ou presque simultanée, c'est la politique. Il est curieux de constater que le pays vit de ce même pouls battant comme s'il pouvait s'affranchir des délais de communication des dépêches et des gazettes. C'est que l'information circule par beaucoup d'autres voies que celui des journaux et des lettres. Tous les hommes qui concourent à l'approvisionnement de la capitale et qui forment sur l'ensemble du territoire, et parfois bien au-delà, des chaînes continues, s'échangent récits et commentaires d'un bout à l'autre de la France. Bien sûr, les nouvelles, à force d'être transmises et enrichies par l'imagination des hommes, sont déformées et, lorsqu'elles sont publiques, les journaux viennent rectifier les embellissements par trop voyants. Mais ce qui circule le mieux, ce n'est pas ce que l'on peut lire dans les journaux mais bien un certain sentiment que les choses vont bien ou qu'elles vont mal. Si les choses vont bien, la famille régnante s'agrandit et l'on montre à la foule, quelques mois après, un nourrisson appelé aux plus hautes fonctions. Quand elles vont mal, la rumeur d'une maladie grave du magistrat suprême enfle soudainement et le pays tout entier a la goutte. Si bien que les journaux ont compris cela qui, quand ils sont proches du gouvernement et que les choses vont mal, s'emploient à imaginer et à divulguer la naissance prochaine d'un prince.
Zola augmenté
Daniel Diégèse
2014










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