Diégèse | |||||||||
lundi 28 juillet 2014 | 2014 | ||||||||
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La Fortune des Rougon2 | |||||||||
Ils
avaient eu, le matin, un avant-goût de la révolte : les quelques républicains
de Plassans, voyant
qu'ils ne sauraient rien tenter de
sérieux dans la ville, avaient résolu d'aller rejoindre leurs
frères de
la Palud et de Saint-Martin-de-Vaulx ; un premier groupe
était parti,
vers onze heures, par la porte de Rome, en chantant la
Marseillaise et
en cassant quelques vitres. Une des fenêtres de Granoux se trouvait
endommagée. Il racontait le fait avec des balbutiements d'effroi. Le salon jaune, cependant, s'agitait dans une vive anxiété. Le commandant avait envoyé son domestique pour être renseigné sur la marche exacte des insurgés, et l'on attendait le retour de cet homme, en faisant les suppositions les plus étonnantes. La réunion était au complet. Roudier et Granoux, affaissés dans leurs fauteuils, se jetaient des regards lamentables, tandis que, derrière eux, geignait le groupe ahuri des commerçants retirés. Vuillet, sans paraître trop effrayé, réfléchissait aux dispositions qu'il prendrait pour protéger sa boutique et sa personne ; il délibérait s'il se cacherait dans son grenier ou dans sa cave, et il penchait pour la cave. Pierre et le commandant marchaient de long en large, échangeant un mot de temps à autre. L'ancien marchand d'huile se raccrochait à son ami Sicardot, pour lui emprunter un peu de son courage. Lui qui attendait la crise depuis si longtemps, il tâchait de faire bonne contenance, malgré l'émotion qui l'étranglait. Quant au marquis, plus pimpant et plus souriant que de coutume, il causait dans un coin avec Félicité, qui paraissait fort gaie. |
Émile Zola 1870
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Le
salon jaune était en somme victime de ses propres croyances,
ayant dépeint des années durant les républicains comme des monstres
sanguinaires et ayant rabâché sans cesse, et sans contradicteur, les
mêmes histoires dans lesquelles leurs ennemis apparaissaient comme des
brutes sans scrupules, ils étaient face à leur propre création, bien
obligés
de croire pour vraies leurs histoires forgées pour leur propagande.
Prêter à son ennemi crimes et abominations est une technique qui a
souvent été employée et qui le sera très certainement encore. Elle peut
s'appliquer à ceux que l'on considère comme les ennemis de l'intérieur
comme à ceux, au-delà des frontières, qui vont jusqu'à égorger et
manger les enfants de leurs ennemis vaincus. Pour le salon jaune, les
ouvriers républicains avaient fini par devenir des
êtres sans foi ni loi, très différents de ceux qu'ils croisaient sur le
marché, et peu importe que ce fussent les mêmes. Les ouvriers étaient
pour sûr des sortes
de loups-garous républicains dont l'appétit de sang revenait
soudainement à l'appel de la Marseillaise. Pour une pierre lancée dans
les fenêtres de Granoux, c'était dans leur imaginaire de
bourgeois,
toute une
lapidation qui était dessinée. Le marquis, habitué depuis des lustres à considérer les roturiers comme des êtres différents de lui et de sa lignée ne prêtait aux pauvres hères aucun mythe particulier. Dans ces cas-là, il se rapprochait davantage de Félicité, donnant à ceux qui les observaient encore plus de certitude sur sa possible paternité. Ils semblaient tous deux, dans leur coin, venir d'une autre planète. |
Daniel Diégèse 2014
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28 juillet | |||||||||
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