Diégèse | |||||||||
dimanche 18 mai 2014 | 2014 | ||||||||
ce travail est commencé depuis 5252 jours (22 x 13 x 101 jours) | et son auteur est en vie depuis 19705 jours (5 x 7 x 563) | ||||||||
ce qui représente 26,6531% de la vie de l'auteur | deux mille huit cent quinze semaines de vie | ||||||||
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La Fortune des Rougon2 | |||||||||
« Nous n'avons besoin
de rien, disait-il ; vous
nous entretiendrez, ma femme et moi, et nous compterons plus
tard. »
Pierre était gêné, il
accepta, un peu inquiet du désintéressement d'Aristide. Celui-ci se disait que de
longtemps peut-être son père n'aurait pas dix mille
francs liquides à lui
rendre, et que lui et sa femme vivraient largement à ses
dépens, tant que l'association ne pourrait être rompue. C'était là quelques billets de banque admirablement placés. Quand le marchand d'huile comprit quel marché de dupe il avait fait, il ne lui était plus permis de se débarrasser d'Aristide ; la dot d'Angèle se trouvait engagée dans des spéculations qui tournaient mal. Il dut garder le ménage chez lui, exaspéré, frappé au cœur par le gros appétit de sa belle-fille et par les fainéantises de son fils. Vingt fois, s'il avait pu les désintéresser, il aurait mis à la porte cette vermine qui lui suçait le sang, selon son énergique expression. Félicité les soutenait sourdement ; le jeune homme, qui avait pénétré ses rêves d'ambition, lui exposait chaque soir d'admirables plans de fortune qu'il devait prochainement réaliser. Par un hasard assez rare, elle était au mieux avec sa bru ; il faut dire qu'Angèle n'avait pas une volonté et qu'on pouvait disposer d'elle comme d'un meuble. Pierre s'emportait, quand sa femme lui parlait des succès futurs de leur fils cadet : il l'accusait plutôt de devoir être un jour la ruine de leur maison. |
Émile Zola 1870
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Aristide était un conteur
d'une grande efficacité. Il savait
exactement ce qu'espérait sa mère et quels étaient ses rêves. Il ne
faisait en conséquence que commencer à leur donner un peu dé réalité ;
et la bonne femme, en entendant de la bouche de son fils ce qu'elle ne
faisait qu'entrevoir le soir avant de s'endormir avait l'impression que
ses chimères étaient devenues réalité. Ce genre de récit est connu depuis l'antiquité. C'est celui du bonimenteur qui promet des fortunes mais c'est aussi celui des poètes qui chantent la gloire des puissants et qui leur annoncent la victoire dans la bataille et des lendemains d'abondance. Ce sont aussi les récits qui décrivent, et parfois par le menu, le paradis d'après la mort et qui envoient, pour le gagner, des cohortes de gamins sur des sentiers glorieux. C'est enfin la forme de tous les chants guerriers et de tous les hymnes. On ne dira jamais assez la puissance du verbe qui peut donner aux inventions de l'esprit plus de réalité que ce que chacun voit chaque jour devant ses yeux et plus de réalité-même que ce qui s'est passé dans les temps historiques. L'histoire, d'ailleurs, sous son apparence d'objectivité, n'échappe pas à cette contamination lyrique. Tant de batailles embourbées sont devenues avec le temps et le talent des conteurs des chevauchées dans des champs fleuris. Tant de héros transis et sans doute angoissés devinrent sous le charme du récit intrépides et superbes. |
Daniel Diégèse 2014
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18 mai | |||||||||
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