Diégèse | |||||||||
jeudi 13 mars 2014 | 2014 | ||||||||
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La Fortune des Rougon2 | |||||||||
L'homme
qui venait d'appeler son père voleur n'avait, d'ailleurs, répété que ce
qu'il
entendait dire depuis des années. Devant l'attitude violente de
l'enfant, les ouvriers ricanèrent. Silvère serrait toujours les
poings. La chose allait mal tourner, lorsqu'un chasseur de la Seille, qui s'était assis sur un tas de pierres, au bord de la route, en attendant qu'on se remît en marche, vint au secours de la jeune fille. « La petite a raison, dit-il. Chantegreil était un des nôtres. Je l'ai connu. Jamais on n'a bien vu clair dans son affaire. Moi, j'ai toujours cru à la vérité de ses déclarations devant les juges. Le gendarme qu'il a descendu, à la chasse, d'un coup de fusil, devait déjà le tenir lui-même au bout de sa carabine. On se défend, que voulez-vous ! Mais Chantegreil était un honnête homme, Chantegreil n'a pas volé. » Comme il arrive en pareil cas, l'attestation de ce braconnier suffit pour que Miette trouvât des défenseurs. Plusieurs ouvriers voulurent avoir également connu Chantegreil. « Oui, oui, c'est vrai, dirent-ils. Ce n'était pas un voleur. Il y a, à Plassans, des canailles qu'il faudrait envoyer au bagne à sa place… Chantegreil était notre frère… Allons, calme-toi, petite. » |
Émile Zola 1870
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Car la foule peut avoir,
comme une seule personne, des
mouvements d'âme qui la font virer et revirer. L'instant d'avant, ces
hommes étaient prêts à se battre pour salir la mémoire d'un homme
qu'ils n'avaient pas connu. Ils étaient désormais prêts tout autant à
se battre pour rétablir l'honneur de ce même inconnu. Ce sont ces
mouvements individuels et collectifs qui rendent les révoltes et les
révolutions incertaines. Peu de choses suffisent à provoquer et à
justifier cette inconstance. Il y a bien sûr la crainte d'être en reste
et parfois un peu de lâcheté et même de bêtise. Mais au fond, il y a
surtout le sentiment de sécurité qui étreint chacun de ceux qui sont
engagés dans une action collective. S'opposer aux changements de pied
intempestifs de la foule, ce serait la quitter et se priver en
conséquence de sa protection maternelle. Et c'est ainsi que Chantegreil de paria devint un héros, le symbole-même de l'injustice de l'ordre de la ville et de la répression de ses forces. Cela doit inciter, très certainement, à relire d'une autre façon les histoires qui nous présentent ces héros issus du rang. Nul doute que certains ont été poussés vers le devant, que d'autres ont été sauvés de la vindicte par le hasard d'un cri ou d'un chant opportuns. Tous ont bénéficié de ces mouvements de groupe qui, l'instant d'après, leur auraient été contraires. |
Daniel Diégèse 2014
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13 mars | |||||||||
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