Diégèse | |||||||||
mercredi 24 septembre 2014 | 2014 | ||||||||
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La Fortune des Rougon2 | |||||||||
Quand l'eau tombait,
le premier arrivé se réfugiait là ; et, lorsqu'ils
s'y trouvaient réunis, ils écoutaient avec une jouissance infinie
l'averse qui battait sur le tas de planches de sourds roulements de
tambour. Devant eux, autour d'eux, dans le noir d'encre de la nuit, il
y avait un grand ruissellement qu'ils ne voyaient pas, et dont le bruit
continu ressemblait à la voix haute d'une foule. Ils étaient bien seuls
cependant, au bout du monde, au fond des eaux. Jamais ils ne se
sentaient aussi heureux, aussi séparés des autres, qu'au milieu de ce
déluge, dans ce tas de planches, menacés à chaque instant d'être
emportés par les torrents du ciel. Leurs genoux repliés arrivaient presque au ras de l'ouverture, et ils s'enfonçaient le plus possible, les joues et les mains baignées d'une fine poussière de pluie. À leurs pieds, de grosses gouttes tombées des planches clapotaient à temps égaux. Et ils avaient chaud dans la pelisse brune ; ils étaient si à l'étroit, que Miette se trouvait à demi sur les genoux de Silvère, Ils bavardaient ; puis ils se taisaient, pris d'une langueur, assoupis par la tiédeur de leur embrassement et par le roulement monotone de l'averse. Pendant des heures, ils restaient là, avec cet amour de la pluie qui fait marcher gravement les petites filles, par les temps d'orage, une ombrelle ouverte à la main, Ils finirent par préférer les soirées pluvieuses. Seule, leur séparation devenait alors plus pénible. Il fallait que Miette franchît son mur sous la pluie battante, et qu'elle traversât les flaques du Jas-Meiffren en pleine obscurité. Dès qu'elle quittait ses bras, Silvère la perdait dans les ténèbres, dans la clameur de l'eau. Il écoutait vainement, assourdi, aveuglé. Mais l'inquiétude où les laissait tous deux cette brusque séparation était un chantre de plus ; jusqu'au lendemain, ils se demandaient s'il ne leur était rien arrivé, par ce temps à ne pas mettre un chien dehors ; ils avaient peut-être glissé, ils pouvaient s'être égarés, craintes qui les occupaient tyranniquement l'un de l'autre, et qui rendaient plus tendre leur entrevue suivante. |
Émile Zola 1870
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Une de ces nuits pluvieuses, où l'averse était particulièrement forte, et alors qu'ils étaient blottis au fond de leur cachette, seuls au milieu des éléments en furie, ils entendirent bientôt un bruit léger qui, tout d'abord, leur sembla devoir être le grincement d'une des planches gorgée d'eau. Mais, quelques instants plus tard, le bruit se fit plus proche et plus insistant, et ils perçurent un mouvement. Ils eurent un sursaut, que Silvère reprit vite, comme l'exigeait le rôle de protecteur qu'aiment à se donner les jeunes hommes. C'était désormais certain, un petit animal était près d'eux, cherchant comme eux à fuir la pluie battante. Silvère s'arma d'un bâton afin de chasser l'animal. Il craignait de voir apparaître l'un de ces rats des champs qu'ils avaient souvent vu traverser devant eux entre les solives abandonnées. Le bruit se rapprochait encore, Mais, avant que Silvère n'eût à lever son arme improvisée, l'animal, tout proche, émit un son qui, à l'évidence, ne pouvait être qu'un miaulement. C'était un chat, un tout petit chat à la couleur indéterminée, survivant apeuré d'une portée dispersée. Miette, rapide et habile, s'en saisit prestement et l'attira contre elle. L'animal cessa vite de se débattre et de sortir ses minuscules griffes qui n'auraient pas écorché un nouveau né pour goûter la chaleur soudaine de ce corps qui l'étreignait, succédané du ventre de cette mère qui l'avait abandonné. Puis, très vite, l'animal ronronna, se donnant entièrement aux caresses que lui prodiguaient les deux enfants. Miette et Silvère étaient ravis, aussi attentionnés que s'il se fût agi de leur premier enfant, trouvant là le moyen d'exprimer, sans crainte de le faire, toute leur tendresse et leur désir de caresses. Mais l'heure de leur séparation approchait, et avec elle, l'heure de se séparer du chat. Il n'était pas possible que Miette l'emportât au Jas Meiffren. Justin faisait la chasse aux chats et il aurait sans aucun doute pris plaisir à tuer celui-ci à coups de pierres. Ils convinrent de la laisser dans leur abri, espérant le retrouver le lendemain. |
Daniel Diégèse 2014
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24 septembre | |||||||||
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