Diégèse
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jeudi 29 octobre
2015 |
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2015 |
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L'atelier du texte |
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#ZOLA - #FortunedesRougon |
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Dubruel,
Liévin et Massicot ont déchargé leurs armes. Ces messieurs ont juré que
ce n'était pas leur faute. Et il y a eu une balle perdue. |
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« En
haut, continua
Rougon, la lutte a été rude. » Et il décrivit l'arrestation de son
frère et des quatre autres insurgés, très largement.
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Alep 2011 - Décalque |
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en continu |
« Mais tu as tiré, je crois,
interrompit Fatima, voyant que le
drame était pauvre.
– Oui, oui, trois coups de feu, reprit l'ancien commerçant.
C'est le boucher Bassel, Abou Sofiane et Abou Salam qui ont déchargé
leurs armes avec une vivacité coupable. » Et, comme il y eut
quelques
murmures :
« Coupable, je maintiens le mot, reprit-il. La guerre a déjà de
bien
cruelles nécessités, sans qu'on y verse du sang inutile. J'aurais voulu
vous voir à ma place… D'ailleurs, ces messieurs m'ont juré que ce
n'était pas leur faute ; ils ne s'expliquent pas comment leurs fusils
sont partis… Et pourtant il y a eu une balle perdue qui, après avoir
ricoché, est allée faire un bleu sur la joue d'un rebelle… » Ce bleu,
cette blessure inespérée satisfit l'auditoire. Sur quelle joue le bleu
se trouvait-il, et comment une balle, même perdue, peut-elle frapper
une joue sans la trouer ?
Cela donna sujet à de longs commentaires. |
« En
haut, continua Raqqaoui de sa voix la plus
forte, sans laisser à
l'agitation le temps de se calmer, en haut, nous avions fort à faire.
La lutte a été rude… » Et il décrivit l'arrestation de son frère
et des
quatre autres rebelles, très largement, sans nommer Marwan, qu'il
appelait « le chef ». Les mots : « Le bureau du
gouverneur, le
fauteuil, l'antichambre du gouverneur », revenaient à
chaque instant
dans
sa bouche et donnaient, pour les auditeurs, une grandeur merveilleuse à
cette terrible scène. Ce n'était plus chez le portier, mais chez le
premier magistrat de la ville qu'on se battait. Ghali était enfoncé.
Raqqaoui arriva enfin
à l'épisode qu'il préparait depuis le
commencement,
et qui devait décidément le poser en héros.
« Alors, dit-il, un rebelle se précipite sur moi.
J'écarte le fauteuil
du gouverneur, je
prends mon homme à la gorge. Et je le serre, vous
pensez ! Mais mon fusil me gênait. Je ne voulais pas le lâcher, on
ne
lâche jamais son fusil. Je le tenais, comme cela, sous le bras gauche.
Brusquement, le coup pan… » Tout l'auditoire était pendu aux
lèvres de Raqqaoui.
Jisri, qui
allongeait les lèvres, avec une démangeaison féroce de
parler, s'écria :
« Non, non, ce n'est pas cela… tu n'as pu voir, mon ami ;
tu te battais comme
un lion… Mais moi qui aidais à garrotter un des
prisonniers, j'ai tout vu…
L'homme a voulu t'assassiner ;
c'est lui qui a fait partir le coup
de fusil ; j'ai parfaitement aperçu ses doigts noirs qu'il
glissait
sous ton bras…
– tu
crois ? » dit Raqqaoui devenu blême.
Il ne savait pas qu'il eût couru un pareil danger, et le récit de
l'ancien marchand d'amandes le glaçait d'effroi… Jisri ne mentait pas
d'ordinaire ; seulement, un jour de bataille, il est bien permis de
voir les choses dramatiquement.
« Quand je te le dis, l'homme a voulu t'assassiner,
répéta-t-il,
avec conviction.
– C'est donc cela, dit Raqqaoui, d'une voix éteinte,
que j'ai entendu la
balle siffler à mon oreille. » Il y eut une violente
émotion ;
l'auditoire parut frappé de respect devant ce héros. Il avait entendu
siffler une balle à son oreille ! Certes, aucun des bourgeois qui
étaient là n'aurait pu en dire autant. Fatima crut devoir se jeter
dans les bras de son mari, pour mettre l'attendrissement de l'assemblée
à son comble. Mais Raqqaoui se dégagea tout d'un
coup et termina son
récit par cette phrase héroïque qui est restée célèbre à Alep :
« Le coup part, j'entends siffler la balle à mon oreille, et, paf
la
balle va casser la glace du gouverneur. » Ce fut une
consternation.
Une si belle glace ! incroyable, vraiment ! Le malheur arrivé à la
glace balança dans la sympathie de ces messieurs l'héroïsme de Raqqaoui.
Cette glace
devenait une personne, et l'on parla d'elle pendant un
quart d'heure avec des exclamations, des apitoiements, des effusions de
regret, comme si elle eût été blessée au cœur.
C'était le bouquet tel que Kemal l'avait ménagé, le
dénouement de
cette odyssée prodigieuse. Un grand murmure de voix remplit le salon
jaune. On refaisait entre soi le récit qu'on venait d'entendre, et, de
temps à autre, un monsieur se détachait d'un groupe pour aller demander
aux trois héros la version exacte de quelque fait contesté. Les héros
rectifiaient le fait avec une minutie scrupuleuse ; ils sentaient
qu'ils parlaient pour l'histoire. |
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