Diégèse




mercredi 14 décembre 2016



2016
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#Péguy-Pasolini - les textes de Diégèse 2016 -










Quoi de plus poignant que ce témoignage, que cette adjuration de Bernard-Lazare condamné, de Bernard-Lazare destiné, quoi de plus redoutable que ce témoignage, redoutable, par sa mesure même. Quand Jaurès, écrivait Bernard-Lazare, se présente devant nous pour soutenir une œuvre qu'il approuve, à laquelle il veut collaborer, il doit, parce qu'il est Jaurès, parce qu'il a été notre compagnon dans une bataille qui n'est pas finie, nous donner d'autres raisons que des raisons théologiques. (Il voyait très nettement combien il y avait de théologie grossière dans Jaurès, dans toute cette mentalité moderne, dans ce radicalisme politique et parlementaire, dans cette pseudométaphysique, dans cette pseudophilosophie, dans cette sociologie.) Or c'est une raison théologique que de nous dire : « (Ici je préviens que c'est du Jaurès, cité par Bernard-Lazare) : « Il y a des crimes politiques et sociaux qui se payent, et le grand crime collectif commis par l'Église contre la vérité, contre l'humanité, contre le droit et contre la République, va enfin recevoir son juste salaire. Ce n'est pas en vain qu'elle a révolté les consciences par sa complicité avec le faux, le parjure et la trahison. » (Fin du Jaurès, de la citation de Jaurès. Bernard-Lazare disait plus simplement : On ne peut pas embêter des hommes parce qu'ils font leur prière. Il les avait, celui-là, les mœurs de la liberté. Il avait la liberté dans la peau ; dans la moelle et dans le sang ; dans les vertèbres. Non point, non plus, une liberté intellectuelle et conceptuelle, une liberté livresque, une liberté toute faite, une liberté de bibliothèque. Une liberté d'enregistrement. Mais une liberté, aussi, de source, une liberté toute organique et vivante.
Regarder ailleurs, ce n'est pas détourner le regard. Ce n'est pas refuser de voir parce que l'image serait insoutenable. Mais c'est, par exemple, refuser les focalisations médiatiques qui fonctionnent toujours sur le mode de l'émotion, qui ne proposent jamais que le mode de l'émotion.
En cette fin d'année 2016, de violents bombardements accablent les civils de la ville d'Alep en Syrie. La situation humanitaire est terriblement dégradée. Dans le même temps la ville de Palmyre a été reprise par l'organisation État islamique au Levant. Deux attentats simultanés revendiqués par un groupe radical kurde ont tué 38 personnes dont 30 policiers à Istanbul. Ces faits sont constitutifs d'une situation militaire et politique au Proche-Orient. L'écrire ainsi est glaçant. Mais, il faut des images.
On trouve beaucoup d'images sur l'internet qui accompagnent les mêmes titres sur le martyre des habitants, à l'appui de commentaires tout aussi indignés qu'impuissants. Parmi ces images, il y a celles qui montrent des enfants d'Alep, blessés, parfois morts, ensanglantés, disloqués. L'écrire ainsi est glaçant.
Regarder ailleurs, s'agissant d'Alep, d'Istanbul et de Palmyre, ce serait refuser de regarder les images. Car, j'affirme qu'il n'y a aucune image de ce qui se passe en ce moment à Alep qui ne soit une image manipulatoire. Il ne peut y avoir que des images manipulatoires. Je ne dis pas que ce sont de fausses images. Je ne dis pas que tout cela est exagéré. Non. Je dis même le contraire. Aucune image ne pourra rendre compte de la souffrance des habitants d'Alep et aucune image ne pourra rendre compte de ma peine.
Charles Péguy - Notre Jeunesse  -
Péguy-Pasolini #24 - Texte continu










14 décembre






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