Diégèse | |||||||||
jeudi 18 février 2016 | 2016 | ||||||||
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Les
« pères » dont il est question dans la phrase de
Croce sont des pères qui convenaient pour les fils de la fin du
dix-neuvième
siècle ou de tout le vingtième jusqu'à il y a une dizaine d'années,
mais plus
aujourd'hui (même si, comme on va le voir, les fils ne le savent pas ou
le
savent mal). D'un point de vue sémantique, le terme de « père » a
commencé à
changer avec, naturellement, Freud et la psychanalyse, pour lesquels
« l'hérédité »
du père n'est plus nécessairement une donnée positive ; on peut
même
très
honnêtement l'interpréter comme totalement négative. le terme de
« père » a
encore plus changé à travers l'analyse marxiste de la société : en
effet, les pères auxquels Croce se réfère avec candeur sont tous de
très beaux
messieurs, bourgeois (comme lui), avec des barbes solennelles et des
cheveux
blancs respectés, debout devant des tables couvertes de papiers, ou
dignement
assis sur des chaises dorées — ce sont en somme, les pères du privilège
et du
pouvoir. Il n'y a pas la moindre référence aux pères balayeurs des rues
ou
maçons, ouvriers agricoles ou mineurs, ouvriers mécaniciens ou
tourneurs, ou
même voleurs et vagabonds. l'hérédité dont on nous parle est une
hérédité de
classe, de pères définis en termes de classe. Nul doute qu'il leur
faille
déployer beaucoup d'efforts pour pouvoir garder
« solidement » leurs
privilèges. Mais, cela (que j'aurais déjà pu observer il y a dix ou
quinze ans)
mis à part, on note quelque chose de totalement nouveau : le vrai
nouveau
pouvoir ne veut plus avoir à compter avec de tels pères. C'est ce
pouvoir qui
ne veut plus que les enfants fassent leur une telle hérédité idéale. Donc, le rapport entre ceux qui ont donné la dissertation à faire et ceux qui l'ont faite s'inscrit dans cette marge de faux pouvoir, que le vrai pouvoir concède encore à ses défenseurs et à ses adversaires, pour liquider académiquement les vieux sentiments. |
Très
récemment, une émission télévisée d'avilissement des
masses a montré comment les médias, croyant jouer avec
la littéralité, peuvent être rattrapés par le sens. Il s'agit de
l'émission « Touche pas à
mon poste », émission qui est en elle-même une tautologie, car
chroniquant d'autres émissions
télévisées, et, en cela, d'emblée suspecte quant à la littéralité. Les
animateurs y
ont des rôles assignés. Parmi ceux-ci, un
bellâtre blond, une sorte de « Ken » de poupée Barbie, avec
quelque
chose d'un peu efféminé, mais pas trop, a le rôle, consenti, de souffre
douleur. Dans un des épisodes, il s'est agi d'illustrer
- littéralement donc - l'expression argotique :
« avoir le cul bordé de nouilles ». Il s'en est suivi que
l'on a versé des nouilles crues
dans le caleçon du beau gosse blond, le tout sur fond de gloussements
sur joués et suraigus de l'animateur vedette. Le seul visionnage de la
scène met mal à l'aise. Quelques jours plus tard, un chroniqueur radiophonique, sérieux et bien intentionné, a qualifié tout cela de comble de l'abjection. Les animateurs incriminés se sont alors défendus sur différents plateaux télévisés. La grande machine télévisuelle se nourrissant d'elle-même, ils ont eu tout loisir de se défendre : il ne s'agissait que d'une plaisanterie ; alors, si l'on ne peut même plus rigoler à la télé ! Le chroniqueur avait pourtant raison mais, le schème d'avilissement qu'il a décelé est encore plus fort que ce qu'il a cru. Peu importe ce que l'émission voulait montrer ! Puisque il s'agissait de littéralité, prenons l'émission au mot : nous y voyons ce que nous y voyons. Or, montrer un homme qui se fait verser des nouilles dans son caleçon est avilissant pour celui qui le subit, celui qui le fait, celui qui le regarde. Il faudrait donc s'éloigner de la littéralité, et ce serait moins avilissant ? Malheureusement non, car, le sens s'est vengé. Qu'est-ce que cette expression dérangeante ? En argot, « nouille » signifie le sexe masculin. L'expression en question désignerait un homme qui se fait sodomiser par d'autres hommes, en prison, car il s'agirait ici de l'argot carcéral parisien. Cet homme est donc supposé avoir de la chance, car, il est de ce fait protégé par les caïds. Alors, revue selon cet éclairage, la scène prend son sens, tout son sens, dénoté, connoté, voire exotérique et ésotérique. La scène dit : les blonds sont des enculés. Et cela fait bien rire les autres, qui sont bruns et exemptés des derniers outrages. J'exagère. Non. L'animateur blond, juste avant la scène de littéralité dévoyée, lâche : ah non, j'en ai déjà assez dans le cul ! Comme quoi il avait, lui, bien compris ce qui se jouait. |
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« Dans la poésie, la
forme, et la forme seule, fait toucher la vérité. Il y a
un pouvoir tactile de la forme. On touche le mot, on touche le vers, on
touche le tercet, et c'est comme si on touchait la vérité. » Roland Barthes - Collège de France - séance du 6 janvier 1979 (à propos du haïku) |