Qui n'a jamais été confronté à cette sentence ? Elle est banale. Elle est la source de tous les conservatismes, mais aussi de toutes les paresses de la pensée. Elle est l'antienne de tous ceux qui s'opposent au changement. Il n'y aurait donc pas grand-chose à en dire...
Et pourtant, le philosophe Daniel Diégèse s'y attaque dans son dernier livre avec la verve et l'énergie qu'on lui connaît. C'est que cet argument qui semble facile est retors pour ce en quoi il fait intervenir une notion terrible qui est celle de la durée. Alors, Diégèse repasse par Bergson, fait un détour par le pragmatisme avant de convoquer l'énigmatique Héraclite.
Et il tombe sur un mystère !
Qu'est-ce qui se joue dans cette défense d'une durée qui n'en est pas une ? Car c'est bien cela, le paradoxe du conservateur : il présente comme naturel quelque chose qui est en permanence contredit, et ce faisant, se contredit lui-même. En fait, ce « on a toujours fait comme ça ! » est l'équivalent sémantique du « tout fout le camp ! » Le conservateur confesserait donc en permanence son échec philosophique. De quoi rendre acariâtre !
Une bien bonne lecture en ces temps où l'on nous vendrait facilement comme solution universelle le retour à un ordre ancestral fantasmatique.