Diégèse




mercredi 28 août 2019



2019
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L'atelier du texte demain










Obsolescence 240



Daniel Diégèse














Cependant, ce qui est frappé d'obsolescence, ou qui semble tel, peut, à la faveur d'un développement technologique accompagné d'un usage massif, sortir de cette obsolescence programmée et reprendre vie. C'est, par exemple, le cas de la typographie. Pendant plus d'un siècle, et près d'un siècle et demi, la machine à écrire, qu'elle fût mécanique ou électrique, s'est évertuée, avec son clavier restreint et mal adapté aux règles de la langue française, à pervertir les règles de la typographie de notre langue, même parmi les plus usuelles, les plongeant dans une obsolescence dont on pouvait penser qu'elles ne reviendraient jamais.

Arriva l'ordinateur, puis l'ordinateur connecté et l'internet. Se jouèrent alors de sombres batailles pour que l'on puisse envoyer aujourd'hui des messages électroniques dont les lettres accentuées gardaient bien leur accent. Il s'agissait d'adopter des normes adéquates de jeux de caractères et de rendre intercompatibles les différents systèmes d'exploitation et les protocoles de transfert. Les batailles institutionnelles ont sans doute moins fait que les grandes firmes informatiques, en premier lieu Microsoft et Apple, pour offrir à leur clientèle francophone, mais surtout dans toutes les langues de la planète qui représentaient un marché, des systèmes respectant leur langue. Et l'usage a emporté l'affaire. Il n'en demeure pas moins des traces de ces conflits propriétaires. Qui n'a jamais reçu un texte dans lequel les caractères semblaient avoir épousé un code de transmission secret dont vous ne possédiez pas la clé ? Il y a fort à parier qu'il provient d'un ordinateur qui n'a pas le même système d'exploitation que le vôtre... et pourtant, ils ne sont, globalement, que trois dans la place.

Pour autant, peu à peu les choses s'améliorent et la plupart des traitements de texte récents adaptés au français, par exemple, insèrent automatiquement une espace insécable devant les signes de ponctuation double, ce que la machine à écrire et leurs ancêtres de première génération avaient fini par nous faire oublier. Faut-il rappeler d'ailleurs que, s'agissant de typographie, le terme « espace » est féminin. C'est sans doute que les typographes qui montaient les textes avec des fontes - et l'on dit « une fonte » - utilisaient pour insérer cet espace blanc une fonte spécifique qui était justement nommée « une espace ».

Ce qui peine à s'améliorer encore, ce sont les accents sur les lettres capitales. Il faut bien avouer que la demande d'usage n'est pas encore très forte et que l'on peine à se remettre de cette règle fortement divulguée et pourtant fausse qui avait voulu que l'on ne mît point d'accent sur les capitales et les majuscules. Les précis de typographie de l'Imprimerie nationale, qui font référence pour le français, sont pourtant formels, non moins que l'Académie française qui rappelle que l'accentuation en français a pleine valeur orthographique. Ce sont souvent les mêmes exemples qui courent pour montrer toute leur efficacité sémantique. S'agissant du titre d'un article de journal, par exemple, il ne sera pas indifférent de savoir, si le fait divers intitulé « UN BANDIT TUE » n'est pas plutôt « UN BANDIT TUÉ » et mieux vaut savoir aussi si les mouvements sociaux sont seulement LÉGITIMES ou s'ils viennent en outre d'être LÉGITIMÉS par le pouvoir en place. Toutes celles et ceux qui ont sincèrement essayé le savent, c'est à peu près toujours possible, techniquement, d'insérer des lettres capitales accentuées dans le texte que l'on écrit, mais souvent au prix de longues recherches et de la saisie de codes complexes qui associent plusieurs touches du clavier de l'ordinateur. Fort heureusement, les correcteurs orthographiques renouant eux aussi avec les capitales accentuées vous les proposeront lors de la correction. Et l'on verra bientôt que ce seront ces correcteurs qui sauveront, après l'orthographe, tout autant la syntaxe, pourtant bien altérée. N'est-ce pas déjà le cas pour nos élégants guillemets français qui associent typographie spécifique et espace insécable.

Il en ira de même, et il en va déjà de même, pour de nombreux savoir-faire ancestraux que le monde moderne avaient relégués dans les ouvrages historiques, fussent-ils numérisés. Ils ont désormais le vent en poupe, comme à chaque fois que l'on craint une forme d'apocalypse.









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4e de couverture






Dans la célèbre conférence donnée à Louvain en 1972, Jacques Lacan dit que « la mort est un acte de foi ». Sa démonstration est à la fois drôle et implacable, qui, en quelques mots, parcourt le chemin de la vie humaine, de cet être dont André Malraux disait que « c'est le seul animal qui sait qu'il va mourir » ; ce à quoi Lacan semble répondre en ajoutant : « le comble du comble, c'est que vous n'en êtes pas sûrs ».
Mais, ce livre, n'est pas un livre sur la mort, ni sur la vieillesse, ni sur le vieillissement. À l'heure où les consommateurs se battent contre l'obsolescence programmée des produits manufacturés, le philosophe Daniel Diégèse s'interroge sur ce que serait l'obsolescence pour la vie de l'être humain. Obsolescence des compétences, obsolescence des goûts, du comportement, du langage... De quoi peut-il bien s'agir ? Qui ou quoi porte cette obsolescence pour autant qu'on parvienne à la conceptualiser ? Est-ce que ce serait cela la construction, non pas de notre vie, mais de notre mort ?
Un livre de rentrée tout à fait revigorant... Car, comme disent les assureurs pour vendre leur camelote, parler de la mort, et, a fortiori, penser la mort ne fait pas mourir.










28 août







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