Diégèse




lundi 4 février 2019



2019
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L'autre Silence 35



Gustav Diégèse














Je vais descendre chercher le courrier. Il est dix heures. La poste a certainement distribué le courrier. J'attends encore une attestation de la Caisse primaire d'assurance maladie. Je ne vais pas prendre l'ascenseur. C'est une des résolutions que j'ai prises, celle de ne pas prendre l'ascenseur pour aller chercher le courrier, considérant qu'il fallait déjà faire travailler les articulations des genoux. Car, je me souviens que mon père disait que la raideur dans les articulations des genoux, c'est la début de la fin. Moi, je voudrais seulement que ce soit la début.

Je vais descendre chercher le courrier. Reste à savoir si je vais pousser jusqu'à la boulangerie ou non. Je pourrais m'acheter un croissant. Mais, je ne sais pas encore si mon niveau de retraite me le permet, ou combien de fois par semaine il me le permettra. Je sais d'emblée que l'apport calorique du croissant ne sera pas compensé par la descente et la remontée de l'escalier. Je ne prendrai donc pas de croissant. Mais, si je ne prends pas de croissant, je n'ai aucune raison de pousser jusqu'à la boulangerie. Le dilemme vaut tout autant pour toutes les haltes possibles entre l'immeuble et la boulangerie. Inenvisageable d'aller prendre un café au comptoir du bar à côté de la boulangerie. J'ai toujours trouvé qu'il n'y avait rien de plus triste, de plus pathétique même, qu'un retraité désœuvré au comptoir d'un bar, serait-ce pour un café. L'usage du café-calva n'est plus aussi répandu que dans ma jeunesse. C'est bien. En tout cas, l'abstinence d'alcool est une autre des résolutions que j'ai prises.


En fait, j'irai chercher le courrier tout à l'heure, sinon demain. Il est fort improbable que la CPAM m'ait déjà répondu. Pour le reste, ce sera des prospectus. Je suis le seul de l'immeuble à ne pas avoir apposé d'autocollant sur la boîte aux lettres interdisant la distribution de publicité. Il faut bien que je garde un prétexte pour aller chercher le courrier. Et cela rend plus intéressante l'opération de tri des déchets ménagers.









page 35










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4e de couverture






C'est la retraite. C'est enfin la retraite. José a travaillé toute sa vie durant, depuis le plus jeune âge d'homme. Il a veillé à faire comme tout le monde : à préparer se retraite. Et ce premier jour de retraite, tout est préparé. Mais il y a une chose à laquelle José n'était pas préparé : le silence.

Il regarde autour de lui. Il y a les objets, qui attrapent les souvenirs comme certains tissus attrapent la poussière. Ils portent les marques des fébrilités de la vie, de ses impatiences et aussi les marques de ses malheurs discrets. Pourquoi sortir ? Pour demeurer silencieux dans le bruit ?

Gustav Diégèse livre un roman introspectif d'une très grande sensibilité. Ses personnages ne sont pas malheureux. Ils ne sont même pas tristes. Mais leur humanité est au-delà de nombre d'illusions. Ils ont ce calme qu'ont aussi les enfants après un gros chagrin.

L'autre Silence s'inscrit dans le droit fil des romans de l'absurde, de l'absurdité de la vie. Et Camus disait : pas d'amour de vivre sans désespoir de vivre.










4 février






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