Maria : « je suis née ici, en fait un peu plus bas. Je m'appelle Maria, ce qui n'est pas très original, surtout ici où Marie est fêtée le dernier dimanche du mois de juillet en tant que protectrice des femmes enceintes. Jeune fille, je n'avais pas du tout l'intention de demeurer à Chialvetta, ni même à Acceil. J'avais même envie de quitter l'Italie. C'était le temps où Berlusconi nous faisait honte tous les jours ou presque, à nous les Italiens. Ici, ce n'est pas une terre pour les politiciens italiens. Il y a une traditions d'indépendance depuis le treizième siècle et c'est non loin d'ici, à Saretto, que les résistants italiens et français ont signé un accord d'alliance.

Je faisais des études à Rome. J'étais rentrée pour l'été chez mes parents qui habitent Acceglio. Vous, les Français, vous devriez dire Acceil. C'est le nom français pour Acceglio, mais cette appellation se perd. J'avais invité deux amies pour une semaine et ce soir-là nous avions décidé d'aller dîner à la pizzeria Il Portichetto à la sortie du village sur la route qui suit la Maïra et qui rejoint ensuite Coni, la grande ville la plus proche, qui est quand-même à une heure de route. Nous avions commandé et nous parlions de choses et d'autres quand Ilario est entré. La patron l'a salué par son prénom. Nous nous sommes retournées pour voir qui était cet Ilario qui entrait. Ce n'était pas un prénom courant à l'époque. Et nous avons vu Ilario. Nous ne le connaissions pas. Puis, tout s'est passé très simplement. Il y avait beaucoup de monde ce soir-là. Nous étions trois à une table de quatre. Il était seul. Le patron, qui me connaissait évidemment depuis toujours, m'a demandé si nous pouvions accepter Ilario à notre table, avec un clin d'œil de patron italien de pizzeria. Et c'est ainsi qu'Ilario a dîné avec nous. Le lendemain, mes copines rentraient chez elles, à Rome, ce qui est un périple de plus de sept heures d'automobile. Le lendemain, Ilario et moi nous sommes revus. »