Diégèse | |||||||||
lundi 10 juin 2019 |
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Sans plus d'interprétation | 161 | ||||||||
Noëmie Diégèse | |||||||||
Quatrième étage gauche : Madame
L., la cinquantaine, cadre supérieure, déjà analysée. « J'ai vu votre
affichette
et je me suis d'abord demandé si c'était bien légal. Vous savez comme
moi, Docteur, que le Code de la santé publique interdit aux médecins de
faire usage de procédés directs ou indirects de publicité. Mais, est-ce
de la publicité, puisque vous ne faites pas payer la
consultation ?
Sauf que si, en tant que psychanalyste, vous ne faites pas payer la
consultation, c'est à dire, la séance, il ne s'agit pas d'une
consultation, ni d'une séance. Donc il ne s'agit pas de publicité pour
votre activité. Mais alors, qu'est-ce que nous faisons ici ? »
Madame L. n'attend pas la réponse que je n'avais d'ailleurs pas l'intention de lui donner. Elle continue, sur un ton tout à la fois agacé et enjoué. J'allais plutôt lui demander pourquoi elle est venue. Mais, je n'ai pas besoin de lui poser la question. Elle y répond d'elle-même. On sent la « pro ». « Je suis venue par
courtoisie. C'est assez amusant cette sorte de fête des voisins pendant laquelle
on s'allonge sur le divan. C'est original. C'est un peu grotesque, mais
original. Je suis donc venue aussi vous demander quelles étaient vos
intentions. Vous devez bien chercher quelque chose pour nous demander
de venir vous rencontrer et vous parler. Je me demande donc ce que vous
voulez. »
Je lui réponds que je n'attends ni ne veux rien. Je suggère que le serrurier ou le plombier installés au pied d'un immeuble pourraient proposer aux habitants de leur faire bénéficier de leurs services, qu'il en va de même pour moi. « Je ne vois pas bien
ce
dont je pourrais parler. Je ne vais pas parler des voisins. Je ne les
connais pas. Cela fait vingt ans que je suis là et je ne saurais pas
les reconnaître dans la rue. Eux me reconnaissent et me saluent, alors
je leur réponds par courtoisie. Enfin, je pense que ce sont des voisins
puisqu'ils me saluent. C'est aussi une défense. Je vis seule. Je ne
voudrais pas qu'ils aient un jour l'idée que je puisse garder leurs
enfants ou aller donner à manger au chat. J'accepterais par courtoisie,
mais je m'en voudrais ensuite énormément. Je n'ai pas construit ma vie
en totale indépendance pour me mettre ainsi un fil à la patte. »
Elle s'arrête de parler. Je ne pose pas de question. Je relève évidemment la double occurrence du terme « courtoisie » et l'expression « fil à la patte ». Elle poursuit. « Je vis seule. J'ai
toujours vécu seule depuis que j'ai quitté mes parents. Bien sûr, j'ai
eu des liaisons, notamment une qui a duré cinq ans. Nous avons peu à
peu espacé nos rencontres jusqu'à ne plus nous voir, sans n'avoir
jamais rompu. Je déteste l'idée des ruptures. On est si peu courtois
quand on rompt. De toute façon, ils ne venaient jamais chez moi. C'est
moi qui allais chez eux. Je ne voulais pas que les voisins les voient
et se disent : tiens ! la voisine a un mec. Je préfère qu'ils
pensent
que je suis une vieille fille acariâtre. Cela les tient à distance.
Parfois, je suis dans mon lit. Je les sens autour de moi. Je me dis que
les jeunes, en bas, doivent quand même baiser de temps en temps, même
si elle, vraiment, ce n'est pas un canon. Alors je mets mes boules
Quies et je prends un cachet. Il ne manquerait plus que je les entende
ou que j'entende pleurer un de leurs mômes. »
C'est alors que je lui fais remarquer que ses propos ne sont pas très courtois. Elle se met à pleurer. Je pense que je vais la revoir. |
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page 161 | |||||||||
Toute la collection | 4e de couverture | ||||||||
Le Docteur Lysandre
aime beaucoup Georges Perec, et tout particulièrement La Vie mode d'emploi,
cette coupe romanesque et titanesque d'un immeuble. Le Docteur Lysandre
est un psychanalyste installé dans un petit immeuble parisien qui n'a
rien de très particulier. Il y croise les habitants quand il vient à sa
consultation. Il entend parfois des échos de leur vie. Il a vu naître
quelques enfants et a cru comprendre qu'un couple s'était séparé. Un
soir, il a entendu pleurer un homme de manière compulsive. Il s'est
longtemps dit qu'il en allait de même dans tous les immeubles et que
cela ne le regardait pas. On lui donnait du « bonjour Docteur » avec
parfois un peu de crainte et toujours beaucoup de respect. Mais, un jour, le Docteur Lysandre décide d'apposer dans le hall de l'immeuble une affichette qui disait ceci : le Docteur Lysandre X propose aux habitants de l'immeuble des consultations gratuites, pour les adultes comme pour les enfants. Et, peu à peu, bravant leur méfiance sinon leur hostilité, tous les habitants sont venus parler. Qu'est-ce que serait un immeuble entièrement analysé ? Il faudra pour le savoir lire le roman jusqu'au bout. Ne trichez pas. Pour goûter la fin, comme dans une analyse, il faut avoir fait le chemin. |
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10 juin |
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