Diégèse | mercredi 26 juin 2019 |
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Les pouvoirs étendus de l'Erdre | 177 | |||
Noëmie Diégèse | ||||
On pourrait croire à Nantes que l'Erdre disparaît, mais
elle est souterraine et son cours a été remblayé. On la retrouvera,
très lasse, dans un bassin de carénage près de l'île de Nantes alors
que de l'autre côté de l'île, souvent boueuse se jette dans la Loire la
Sèvre nantaise. Anne regarde le monument aux cinquante otages édifié
après la seconde guerre mondiale. Elle apprend que ce sont les otages
fusillés à Nantes, mais aussi à Châteaubriant et au Fort du Mont
Valérien, à Suresnes près de Nanterre. Lui reviennent ainsi les vers
d'Aragon de ce poème de la Résistance intitulé La Rose et le réséda : « Un rebelle est un
rebelle / Nos sanglots font un seul glas / Et quand vient l'aube
cruelle / Passent de vie à trépas / Celui qui croyait au ciel / Celui
qui n'y croyait pas ».
Elle lit un après l'autre le nom des quarante-huit otages fusillés. Il n'y en avait pas cinquante, deux des otages ayant été libérés peu de temps avant leur exécution. Elle constate qu'elle connaît peu de ces noms. Certains ont des rues et des places. Guy Môquet a été remis en lumière par Nicolas Sarkozy. Des seize hommes fusillés à Nantes au champ de tir du Bêle, non loin de la place où elle se trouve, elle n'en connaît aucun. Les moteurs de recherche sur l'internet lui confirment que Maurice Allano, nantais de vingt-et-un ans, qui n'était que soupçonné de résistance, n'a ni rue ni place. Elle trouve sur le site du journal Ouest-France une série de portraits au fusain. Maurice Allano avait de grands yeux. Michel Dabat avait vingt ans et la bouche sensuelle. Elle se demande quels ont été les amours de ces jeunes gens et vers qui leurs pensées s'étaient envolées. De l'autre côté de la place, le général de Gaulle veille. Il semble faire les cent pas, veillant sur la disparition de l'Erdre. Anne se demande si elle doit continuer à marcher sur le cours des cinquante otage et si la prédiction de la voyante vaut aussi quand la rivière est souterraine. Cela lui semblait déjà ridicule, parfois, de chercher l'amour le long d'une rivière. Ça l'est encore davantage s'il s'agit de le chercher le long d'une rivière souterraine. Ce serait un peu comme tomber amoureuse d'un mort, d'un de ces jeunes fusillés dont elle vient de voir les portraits. Anne est aussi lasse que l'Erdre et tout aussi sombre que la Sèvre nantaise. Elle repousse de son esprit la chanson de Barbara. D'ailleurs, il ne pleut pas et personne n'est mort, encore, à part ces otages qui n'étaient pas cinquante. Elle continue sa marche, ne retrouve pas l'Erdre et se pose dans un café. Il lui faudra le lendemain remonter le cours de la rivière. Il faut qu'elle retourne à Nort-sur-Erdre. Elle ira sur sa bicyclette. Cela ne devrait pas être trop difficile. Il faut à peine deux heures, et elle est entraînée. page 177 |
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