Diégèse




dimanche 20 octobre 2019



2019
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Le Marquis de Carabas 293



Noëmie Diégèse




Les chats bottés ont cette capacité, à toutes les époques, de placer dans les médias n'importe quelle sottise, n'importe quel projet absurde, et de lui faire donner un traitement digne d'une information sérieuse, d'une information informée. C'est rarement gratuit et, dans la plupart des cas, il s'agit de servir des intérêts économiques ou politiques dont le faux nez dépasse souvent des dépêches et reportages fabriqués. Il faut avouer que le pouvoir en France fait preuve d'une lâcheté insondable face aux médias, prompts quant à eux à se faire le relai de divagations. Il suffirait pourtant le plus souvent de ne pas se laisser impressionner par des tentatives d'intimidation pour ne pas être pollué par des billevesées. Mais, les chats bottés sont capables, le monde politique et médiatique étant ce qu'il est, de placer n'importe quel sujet dans l'agenda politique. Les cabinets ministériels s'agitent, demandent sur l'heure des notes à leurs services, qui sortent de leurs tiroirs numériques la note fournie au ministre précédent. C'est que les chats bottés ne désarment pas facilement quand il s'agit de vendre leur salade. Un ministre n'en veut pas ? Ils guettent le suivant.

Il y avait évidemment un marquis de Carabas dans l'affaire dite des Avions renifleurs, par exemple. On se souvient de ce scandale français des années 1970 qui a vu des centaines de millions de francs de l'époque dépensés pour fabriquer un appareil fantaisiste supposé pouvoir détecter les champs pétrolifères depuis un avion. Le chat botté de l'histoire pourrait être Jean Violet, ancien membre des services secrets, introduit dans les sphères du pouvoir politique de l'époque tout autant que dans celles de l'Église catholique. La différence avec le conte, c'est que c'est le chat botté qui a profité de l'argent volé et non les deux marquis de Carabas de cette histoire.

Prenons maintenant, plus près de nous, le projet de reconstruction du palais des Tuileries détruit par incendie pendant la Commune de Paris, les 22 et 23 mai 1871. On imagine bien que les membres de l'association auto-proclamée Comité national pour la reconstruction des Tuileries n'ont aucune arrière-pensée politique et ne souhaitent œuvrer que pour la restauration d'un monument patrimonial parisien majeur. Personne n'en doute. Personne ne devrait douter non plus que l'entreprise a peu d'avenir, sinon aucun. Qu'à cela ne tienne, les chats bottés sont à la manœuvre. Ainsi, le 12 juin 2008, la sénatrice de Paris Madame Catherine Dumas saisit par écrit la ministre de la Culture et de la communication sur le projet de reconstruction. Elle s'inquiète des travaux d'une commission d'études créée par arrêté le 6 juin 2006, chargée de se pencher sur la question et présidée par Maurice Druon. Sans doute, certains membres de Cabinet, rarement cultivés, avaient alors pensé qu'il était suffisamment âgé pour avoir connu le palais des Tuileries avant sa destruction. Tout cela est évidemment absurde. Peu importe, la machine administrative est en marche et la ministre répond à la sénatrice. C'est à dire que l'on consomme des heures et des heures de travail de fonctionnaires de tout rang. On apprend de la réponse que la commission Druon a travaillé : cela ne coûterait que 500 Millions d'euros défiscalisés. La ministre d'alors, Madame Christine Albanel, sagement, répond que si l'on disposait de cet argent, on ferait autre chose, comme restaurer le château de Villers-Cotterêts. Le projet est donc enterré... provisoirement, car les chats bottés guettent et parcourent sans relâche les travées des assemblées comme les couloirs ministériels.

D'ailleurs, on restaure Villers-Cotterêts.










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4e de couverture






Vous vous souvenez du chat botté ? Ce chat rusé chaussé de bottes de sept lieues qui parvient à faire de son maître, dernier fils d'un meunier pauvre qui n'a que lui pour héritage, le marquis de Carabas, le gendre du roi. On peut quand-même se demander pourquoi le roi ne s'est jamais enquis de la véracité des dires de ce chat... et n'est jamais allé vérifier la véritable identité du mari de sa fille... Et le voilà prince, et le voilà roi.
On pourrait penser que Le Marquis de Carabas n'est rien de plus qu'un conte de fées, qui n'a d'autres vertus que celle de faire rêver les enfants, petits et grands. Pourtant, à mieux y regarder, la vie moderne regorge de marquis de Carabas de toutes les engeances... et en y regardant mieux encore, ils sont flanqués de leur chat souvent botté, grimé, poudré. Noëmie Diégèse est allée les débusquer dans les couloirs du pouvoir comme dans ceux des incubateurs de start-up. Chats bottés nationaux ou territoriaux, marquis numériques ou chats lobbyistes, les faiseurs de reines et de rois sont nombreux, passés maîtres dans ce nouvel art de l'enfumage que l'on nomme « fake-news » ou encore « infox » pour suivre les préconisations pertinentes de la Commission nationale de terminologie.
Lisez ce livre, nul doute que vous y reconnaîtrez au moins une personne que vous avez croisée ou que vous croisez tous les jours.










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