Diégèse




vendredi 27 septembre 2019



2019
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Le Froid redouble 270



Mathieu Diégèse














Marthe ouvre ses volets comme chaque matin depuis plus de trente ans, depuis qu'elle est venue habiter dans cette maison de bord de route qui appartenait à sa grand-mère afin de quitter la ville et profiter un peu de la campagne. Mais, elle n'avait pas prévu que la route prendrait ses aises, rognant peu à peu le terrain devant la maison. La maison de sa grand-mère était un ancien relais d'étape et de vieilles photographies sépias montraient bien que plusieurs rangées de voitures pouvaient stationner ensemble devant la maison, du côté des hautes portes qui ouvraient alors sur ce qui était encore une grande écurie. Et puis, il y avait eu la construction de la troisième voie, puis de la quatrième. Désormais, en tendant le bras, elle pourrait presque toucher la glissière de sécurité. On lui a même proposé un mur anti-bruit, mais elle a rétorqué qu'elle préférait encore le bruit à l'absence quasi totale de lumière dans les pièces en façade qui, par tradition, étaient les pièces de vie. Elle avait bien fait, car, de mois en mois, ces dernières années, le trafic avait décru pour enfin quasiment s'arrêter. Cela faisait plusieurs jours qu'elle n'avait entendu aucun moteur, ni de voiture, ni de moto, ni de camion. Au début, elle avait pensé que c'était parce que, l'habitude et l'âge faisant, elle ne les entendait plus. Puis, elle avait dû se rendre à l'évidence. Il n'y avait plus aucun véhicule à moteur sur la route nationale. Elle alla chercher la radio qu'elle laissait dans sa chambre à coucher. Elle tourna le bouton des fréquences de la butée de gauche à la butée de droite sans obtenir autre chose que des grésillements. Elle se dit que cette vieille radio ne fonctionnait plus. Il faut préciser que cela faisait plusieurs années qu'elle ne l'écoutait plus, ne trouvant aucun intérêt aux émissions proposées sur les grandes ondes. Elle aurait pu faire l'acquisition d'un poste plus perfectionné, mais elle avait préféré ne rien entendre. Quant à la télévision, depuis l'enfance, elle avait toujours détesté cela, elle ne savait pas pourquoi.

Mais, ce matin, Marthe entend de drôles de bruits, comme des bruits de pas et d'objets que l'on traînerait sur l'asphalte. Elle pense d'abord que ce sont ses acouphènes qui lui jouent des tours mais, c'est ce qui lui a fait ouvrir ses volets à six heures plutôt qu'à sept heures trente comme elle en a l'habitude. Et, de l'autre côté de la barrière de sécurité, elle voit un groupe d'une bonne centaine de personnes, tirant des carrioles de fortune, passer devant chez elle, sans doute pour rejoindre le bourg un peu plus loin dans l'intention de s'y reposer. « Encore des réfugiés ! » se dit-elle.

Elle referme ses volets, sachant qu'ils auraient déjà frappé à la porte s'ils avaient eu besoin de quelque chose.









page 270










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4e de couverture






Avec Le Froid redouble, Mathieu Diégèse renoue avec le genre du roman d'anticipation. Cette fois, il place ses personnages, que l'on connaît bien pour les avoir rencontrés dans ses romans précédents, notamment dans La Ville de l'absence, au cœur d'une métropole française. Il commence à faire froid, puis de plus en plus froid... puis encore plus froid. Peu à peu, tous les services publics se dérèglent, puis s'arrêtent. La population tente de fuir, échafaude des stratégies de survie. Mais, est-ce encore possible ?
À l'heure du dérèglement climatique et du - mauvais - traitement des réfugié.e.s, le roman de Mathieu Diégèse Le Froid redouble sonne nos consciences. Il nous rappelle la fragilité, sinon la précarité de ce que nous croyons acquis pour nous-mêmes : l'eau courante, l'électricité, la téléphonie, les moyens de transport et même la nourriture.
Ces spectres sur les routes pourraient bien nous ressembler bientôt.
Ce roman rejoindra certainement le panthéon de ceux qui, par le passé, ont sonné comme des alertes. Il donnera envie de les relire et ne pâlira pas à leur comparaison.
Un grand succès d'édition.
Le coup de cœur des lectrices et des lecteurs.










27 septembre







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