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Je suis descendu vers la côte, laissant pour un jour entier Vibo Valentia pour Vibo Marina. J'ai l'impression d'être sur La longue Route de sable
de Pasolini et je me promets de vérifier plus tard s'il évoque dans son
texte Vibo Marina. C'est l'hiver et l'Italie, même en Calabre, est plus
occupée à préparer Noël au jour le jour de l'avent qu'à marcher sur le sable des longues plages et il faut de l'imagination pour imaginer ces étendues sous le vent dans un joyeux brouhaha, comme dans un tableau naïf
et coloré par les rires et les jouets posés sur le sable. J'aime le vent. Le vent est ma mémoire et tout le vent porte toute la mémoire de toutes les vies, au jour le jour, encore et encore.
J'ai marché longtemps au bord de la mer. Quand on marche, il faut
marcher longtemps car, ce n'est qu'après au moins une heure de marche
que des détails attirent l'attention et surtout que l'esprit délassé laisse venir de nouvelles idées et cela peut advenir aussi bien dans des villes saturées par l'urbain que dans une garrigue desséchée et même sur une plage de Calabre. Cela ne dépend pas de la nature du paysage. Et peu importe que ces nouvelles idées arrivent parfois dans une ténuité inquiétante qui les met parfois au bord de l'occultation. Aujourd'hui je me suis pris à imaginer qu'il y aurait un voyage avec des personnages qui se rendraient toujours au même endroit et Vibo Marina serait alors un passage obligé. Et puis, je me suis dit que ce n'était pas vraiment une idée nouvelle et que c'était même certainement une fausse bonne idée.
Et puis je suis remonté sur le plateau pour rejoindre l'hôtel. J'allais arriver sans encombre
quand, juste devant moi, deux voitures se sont heurtées. Comme dans un
film, les conducteurs, deux jeunes hommes énervés, sont descendus avec
de grands gestes et la parole forte. La séquence était intéressante. Il est en effet toujours intéressant de constater comment la colère se nourrit de la colère. Bien sûr, le plus virulent était celui qui avait refusé de céder le passage et il était au fond embarrassé, comme je l'étais de devoir passer tout ce temps à les regarder faire semblant d'être prêts à se battre.
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