mercredi 8 février 2023

jeudi 8 février 1962, il y a 61 ans Des milliers d'étudiants et de professeurs ont manifesté " pour la défense des libertés "

Le Monde - publié le 8 février 1962



Des milliers d'étudiants et de professeurs ont manifesté " pour la défense des libertés "
La manifestation universitaire pour la défense des libertés, qui a rassemblé mardi à Paris treize mille étudiants et enseignants, comme le Monde l'a indiqué, a également été très suivie en province.


Les différents rassemblements, qui ont tous eu lieu en dehors des locaux universitaires, n'ont provoqué aucun incident. Ainsi que le signalent nos correspondants particuliers, des milliers de personnes se sont réunies dans les villes universitaires et dans de nombreuses autres localités. Souvent l'assistance à voté une motion.

Par exemple les mille manifestants de Limoges ont adopté le texte suivant :

" La dégradation de la situation s'accélère. Les valeurs morales sont menacées chaque jour un peu plus, comme en témoigne le jugement scandaleux récemment rendu par le tribunal permanent des forces armées, Les droits élémentaires et les libertés de l'homme subissent de graves atteintes. En même temps se poursuit la mise en condition du pays... La violence et le crime se substituent à l'affrontement des idées par l'action d'un fascisme renaissant. La nation tout entière est entraînée vers le pire... Le drame algérien compromet toujours plus la vie nationale. La paix par la négociation est devenue l'exigence absolue. L'Université en présence de cette situation ne saurait demeurer silencieuse et résignée... "

À Montpellier la manifestation a eu lieu devant le domicile du professeur Ludger Pinet, président de la Ligue des droits de l'homme, dont l'appartement avait été plastiqué. Une délégation s'est ensuite rendue au domicile de M. Jean Aldemar, juge d'instruction, également victime du plastic de l'O.A.S.

À Clermont-Ferrand, professeurs et étudiants ont défilé dans les rues.

La Fédération de l'éducation nationale et l'Union nationale des étudiants de France, qui avaient organisé en commun ces manifestations, se félicitent de leur succès dans un communiqué :

" L'Université, déclarent-elles, en présence des menées factieuses d'une minorité d'agitateurs dont le but subversif est d'établir le fascisme en France, a affirmé en ce 6 février 1962 qu'elle ne demeure et ne demeurera ni silencieuse ni résignée. Fidèle à sa vocation et à sa tradition, elle a exprimé sa volonté de sauvegarder les valeurs fondamentales dont elle est dépositaire et gardienne. Les coups qui lui sont portés à travers ses maîtres lui en font plus encore l'obligation...

" ...Aujourd'hui février, de l'école de village à la Sorbonne, l'Université a exprimé sa volonté de voir cesser l'avilissement collectif. Elle demande au pays d'entendre son cri d'alarme et sa protestation. Affirmant son opposition à la violence et à la menace fasciste, son exigence de la paix par la négociation en Algérie, elle s'est dressée et se dressera tout entière pour maintenir en France les droits de l'homme et du citoyen. "
Le Monde