mardi 28 février 2023

mardi 28 février 1967, il y a 56 ans Le contrôle obligatoire des véhicules n'a pas encore été décidé

Le ministère de l'équipement avait annoncé, le 2 juin 1966, une série de vingt-trois mesures pour renforcer la sécurité routière. Neuf mois après, beaucoup d'entre elles ne sont encore qu'à l'état de projets, et il paraît impossible de prévoir quand elles seront mises en application.

Le Monde - publié le 28 février 1967




La plupart visaient à améliorer, par une sélection et un contrôle plus sévères, la qualité de la conduite et celle du véhicule. Au premier chapitre figurait une " remise à jour " de l'examen du permis de conduire, remise à jour qui a tout de même été faite pour l'essentiel. Elle porte à la fois sur la durée et la nature de l'épreuve de conduite, et sur les interrogations concernant la signalisation, le code de la route et la réglementation locale.
1) À partir du 1er avril la durée de l'examen sera portée de quinze à vingt minutes (d'où une augmentation du droit d'examen, qui est passé de 10 à 15 F dès le 1erjanvier 1967). Il pourra comporter, précise le nouveau programme, " lorsque les circonstances de temps et de lieu s'y prêteront et si aucune interdiction ne s'y oppose, un parcours à effectuer hors agglomération, à une allure soutenue ".
Cette épreuve sur route est la principale nouveauté : jusqu'ici le programme d'examen ne prévoyait que la conduite en agglomération, sur des trajets assez développés, toutefois, pour atteindre l'allure minimale de 50 kilomètres-heure. Désormais le candidat devra savoir rouler à ce qui est appelé une " allure soutenue ", c'est-à-dire en moyenne à 70 kilomètres-heure, et pendant plusieurs minutes.

Décentraliser les circuits d'examen

Si l'épreuve sur route peut être effectuée facilement dans la plupart des centres de province, en revanche, dans les grandes agglomérations, et particulièrement à Paris, elle nécessitera une réorganisation complète des circuits d'examen. Celle-ci a été mise à l'étude au Service national des examens du permis de conduire : elle aboutira obligatoirement à une décentralisation des circuits, qui devront, pour la plupart, être localisés à la périphérie des grandes villes.

2) À partir du 1er mars, les épreuves orales subiront des modifications de détail. C'est ainsi que l'examinateur ne demandera plus : " En ville, où est-il interdit de stationner ? ", car il n'y a pas moins de dix-sept interdictions, et à la limite, le candidat pouvait être tenu de les réciter toutes. Il demandera seulement de citer trois cas d'interdiction. En outre, l'inspecteur pourra poser des questions sur les points suivants :
  • La signalisation, soit d'indication (hôpital, parc de stationnement, etc.), soit de localisation (panneaux d'agglomération et de fin d'agglomération, particulièrement utiles puisqu'ils servent à limiter la vitesse à 60 kilomètres-heure).
  • La présignalisation des véhicules qui se trouvent en stationnement irrégulier par suite d'une panne ou d'un accident, ou celle des obstacles.
  • Les miroirs rétroviseurs : comment ils doivent être disposés et à quelles conditions doit satisfaire leur champ de visibilité.
  • Les dangers particuliers de la conduite de nuit (éblouissements, défaut d'éclairage des cyclistes, mauvaise appréciation des distances et des gabarits, buée sur les vitres, reflets, etc.).
  • Les différences qui existent entre une route à grande circulation et une route nationale.
  • La conduite en état d'ivresse : cinq séries de questions sont prévues, portant notamment sur la façon pour un automobiliste de reconnaître s'il est en état de conduire ; sur l'alcootest ; sur les risques auxquels expose l'absorption d'alcool ; sur les sanctions pénales et administratives qui répriment, depuis la loi du 18 mai 1965, la conduite sous l'empire d'un état alcoolique, même en l'absence de signe manifeste d'ivresse (article L 1er du Code de la route).
Pour les candidats au permis C (poids lourds), une question a également été ajoutée, sur la périodicité des visites médicales auxquelles sont astreints les conducteurs professionnels de poids lourds (ces visites sont obligatoires à l'âge de trente-cinq, quarante-cinq, cinquante, cinquante-cinq et soixante ans, et, au-delà, tous les deux ans).

Vérifier les voitures endommagées

La modification de l'examen du permis de conduire devait s'accompagner de certaines restrictions qui n'ont pas encore été décidées : l'obligation d'attendre trois ans pour se représenter à l'examen après un quatrième échec, la création d'un permis spécial pour la conduite des véhicules très rapides, la limitation de la vitesse à 90 kilomètres-heure pour les conducteurs titulaires du permis depuis moins d'un an ou pour ceux qui sont âgés de moins de vingt ans. Ces deux dernières mesures semblent en effet difficiles à appliquer, ou injustement discriminatoires.

Il paraît d'ailleurs impossible d'aggraver le contrôle des conducteurs tant que n'auront pas été rendues obligatoires, pour les voitures de tourisme, les vérifications techniques effectuées annuellement sur les taxis, les voitures-écoles, les camions d'un poids total autorisé en charge supérieur à 6 tonnes, les véhicules servant au transport en commun (public ou privé) de neuf personnes au moins.
Une enquête effectuée dans vingt-six pays par la Fédération Internationale automobile a montré qu'on tend de plus en plus à l'étranger à imposer ces contrôles obligatoires, tout au moins au bout d'une certaine période d'utilisation : celle-ci varie d'un an après la première immatriculation (comme en Australie) à six ans (comme en Belgique). Une fois la première visite effectuée, les contrôles sont faits, par la suite, généralement tous les ans.
Dans ces mêmes vingt-six pays, d'après l'enquête, apparaît de plus en plus l'idée de soumettre à une vérification technique les véhicules impliqués dans des accidents et ceux qui changent de propriétaire, de même que les voitures louées sans chauffeur. L'une ou l'autre vérification est déjà pratiquée en Belgique, en Espagne, aux Etats-Unis (dans vingt-deux Etats sur cinquante), au Japon, au Luxembourg, en Norvège, en Union soviétique, etc. Ces vérifications n'existent en France, pour les voitures endommagées, que par décision de justice.

M. Edgard Pisani déclarait récemment : " Nous voudrions obtenir une sorte de visite générale des automobiles fous les trois ans, comme cela se pratique couramment en Angleterre. Un organisme centré sur les automobiles-clubs pourrait être chargé de cette fâche. "

Les pays qui ont rendu les contrôles obligatoires en confient le plus souvent la responsabilité à des clubs ou des organismes privés. Si le principe devait être adopté en France, il serait bon de s'en remettre à un organisme public, insensible au souci commercial : les visites n'en seraient pas rendues gratuites pour autant. À l'étranger, les tarifs des visites varient ainsi de 12 F (comme en Belgique) à 5,60 F (comme en Italie).

Les contrôles effectués annuellement - mais cette fois à titre gratuit - par les automobiles-clubs français montrent la nécessité de telles " expertises " : en 1966, en effet, sur cinq cent soixante mille véhicules examinés par les centres de sécurité de ces automobiles-clubs (soit le vingtième du parc automobile français), 34 % ont révélé de graves défauts dans l'un des organes essentiels à la sécurité, tels que les systèmes de freinage, d'éclairage ou de direction : on trouve des proportions différentes en Angleterre (25 %), en Allemagne de l'Ouest (47%), en Belgique (31%).

Les clubs automobiles effectuent ces vérifications toute l'année et auprès de ceux qui le demandent(1) : ils disposent pour cela de cent trente et un centres, dont la plupart sont itinérants. Les centres fixes sont installés à Paris (boulevard de l'Amiral-Bruix), à Lille, à Valenciennes, à Nancy, à Dijon, à Clermont-Ferrand, à Lyon, à Nice, à Marseille, à Nîmes, à Bordeaux, à Charleville, à Arras, à Lons-le-Saunier, à Pau, à Saint-Etienne.

(1) Fédération des Automobiles-Clubs, 65, avenue d'Iéna, Paris. (Tél. 553 03-36.)

Le Monde