Diégèse | |||||||||
vendredi 2 mai 2014 | 2014 | ||||||||
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La Fortune des Rougon2 | |||||||||
Le jeune ménage, resté seul
maître de la
maison, pensa qu'il
avait enfin fixé la fortune. « Tu as vaincu mon guignon », disait parfois Félicité à son mari. Une des rares faiblesses de cette nature énergique était de se croire frappée de malchance. Jusque-là, prétendait-elle, rien ne leur avait réussi, à elle ni à son père, malgré leurs efforts. La superstition méridionale aidant, elle s'apprêtait à lutter contre la destinée, comme on lutte contre une personne en chair et en os qui chercherait à vous étrangler. Les faits ne tardèrent pas à justifier étrangement ses appréhensions. Le guignon revint, implacable. Chaque année, un nouveau désastre ébranla la maison Rougon. Un banqueroutier lui emportait quelques milliers de francs ; les calculs probables sur l'abondance des récoltes devenaient faux par suite de circonstances incroyables ; les spéculations les plus sûres échouaient misérablement. Ce fut un combat sans trêve ni merci. « Tu vois bien que je suis née sous une mauvaise étoile », disait amèrement Félicité. |
Émile Zola 1870
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Sa mauvaise étoile, à bien y considérer, était sa cupidité et sa soif de pouvoir et de puissance. Se serait-elle adoucie, jouissant de la vie, de sa situation qui n'était pas si mauvaise que la chance lui aurait souri. Mais, le destin, quand il se voit forcé trop fortement et mené à force de coups de menton et de calculs mesquins, souvent se dérobe et se plaît ainsi à faire croire aux avaricieux qu'ils n'ont pas de chance. C'est ainsi, de la même façon, que les hommes ont inventé la grâce, qui touche ceux qui, sans effort particulier, du moins en apparence, reçoivent de nombreux bienfaits. On dit que tout leur sourit mais, le plus souvent, c'est que ce sont eux qui sourient au monde et qu'ainsi souriant, ils s'en attirent la bienveillance. Mais la ténacité, parfois, réussit à vaincre la malchance et des destins mal tournés se laissent parfois convaincre au bout de quelques années. Le plus triste, sans doute, et ce qui est vécu comme la plus grande injustice, c'est la chance qui vient trop tard pour être dégustée. Ce vieillard n'a pas besoin de cet héritage soudain qui lui vient d'un cousin éloigné qui n'avait que deux ou trois années de plus que lui. Cet homme à qui l'on offre une maison en haut de la colline est désormais trop essoufflé pour pouvoir s'y rendre. La vie est ainsi faite qu'il est préférable de ne pas tenter la chance, ni le guignon. |
Daniel Diégèse 2014
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2 mai | |||||||||
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